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La Lettre inachevée : la sublimation du réel (en Blu-ray et DVD)

Blu ray La Lettre inachevee 00

Note artistique : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rouge(5/5)

Synopsis

Quatre géologues partent en expédition au cœur des forêts de Sibérie, à la recherche d'un gisement de diamants. Le petit groupe explore sans relâche terres et rivières. L'automne arrive et les vivres commencent à manquer, il leur faut rentrer. Mais au moment du retour, les éléments de déchaînent et ils doivent affronter les pires difficultés.

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• Titre original : Neotpravlennoe pismo (Неотправленное письмо)
• Support testé : Blu-ray
• Genre : drame, aventure
• Année : 1960
• Réalisation : Mikhaïl Kalatozov
• Casting : Innokentiy Smoktunovskiy, Tatyana Samoylova, Vasiliy Livanov, Evgeniy Urbanskiy, Galina Kozhakina
• Durée : 1 h 36 mn 19
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 1,37/1 Noir et Blanc
• Sous-titrage : français
• Piste sonore : DTS-HD MA 2.0 monophonique russe
• Bonus : La Lettre inachevée, un diamant noir, analyse du film par Eugénie Zvonkine, enseignant-chercheur en cinéma (2022, 25 mn 03) - un livret avec le compte-rendu d'observation de Gunārs Piesis, les extraits du journal de tournage d’un membre de l’équipe (anonyme) et des souvenirs de David Vinitski, le directeur artistique du film (60 pages)
• Éditeur : Potemkine Films

Commentaire artistique

Réalisé en 1960, entre Quand passent les cigognes (1957) et Soy Cuba (1964), La Lettre inachevée confirme la supériorité artistique de Mikhaïl Kalatozov, cinéaste soviétique «découvert» dans les années 50 puis 90, qui est, assurément, une des grands maîtres du 7e Art, surtout lorsqu’il est associé, comme pour ces trois films, à un directeur de la photographie d’exception, Serguei Ouroussevski. Le duo remporta, au Festival de Cannes 1958, une Palme d’or bien méritée qui aurait dû être étendue aux deux autres films (hélas le film La Lettre inachevée a été retiré avant sa projection) dont on peut espérer, un jour, une sortie 4K par Mosfilm ! Dans l’attente, la version blu-ray proposée par cette édition est cependant techniquement très recommandable. La Lettre inachevée est le moins connu des films de Mikhaïl Kalatozov malgré des qualités dramatiques et formelles équivalentes, peut-être parce que moins soutenu, les autorités soviétiques lui reprochant d’avoir privilégié la forme (magnifique il faut le dire) sur le fond (glorification du dévouement à la patrie). Dans les trois films cités, et particulièrement dans La Lettre inachevée, Mikhaïl Kalatozov, qui fut autrefois documentariste et chef opérateur, appliqua sa conception d’un style - pas toujours au goût de tout le monde - capable de susciter l’émotion, ce qu’il réussit conjointement avec son directeur photo, en se fondant formellement sur les travaux de l’artiste Alexandre Rodtchenko, pionnier du constructivisme russe. L’intrigue de La Lettre inachevée, film d’aventures patriotiques entre thriller et survival, est inspirée d’une nouvelle de l’écrivain-géologue Valeri Ossipov, «Les diamants de Yakourie» (1958), qui raconte la mission périlleuse en Sibérie de trois géologues, Constantin Sabinine (Innokentiy Smoktunovskiy), Andrey (Vasiliy Livanov) et Tanya (Tatyana Samoylova), en compagnie de leur guide Serguey (Evgeniy Urbanskiy). La production du film fut, à elle seule, fut une véritable aventure dont on mesure les périls et les difficultés grâce aux documents proposés dans le livret donné en supplément. Filmé en décors naturels dans la taïga sibérienne, où l’équipe passa de longs mois de solitude avec des températures extrêmes par - 40°C, le tournage nécessita de l’abnégation de la part des acteurs, qui ont dû faire leurs propres cascades et apprendre les gestes des géologues, et un incroyable génie du bricolage de la part des techniciens. Des photographies (cf. bonus) montrent comment le duo Mikhaïl Kalatozov /Serguei Ouroussevski dut ruser pour rendre la caméra mobile au milieu de nulle-part et inventer des travellings insensés au milieu des flammes. Les innovations incessantes des cadrages, sans grue ni rails, sont parfaitement assurées par le recourt aux ressources naturelles (exemple : troncs d’arbres pour improviser une balançoire nacelle de caméra) : les plans vertigineux dans la taïga en flammes sont un tour de force qui obligea l’équipe à reconstituer une fausse taïga dans la taïga (autrement dit une réalité artificielle !) pour pouvoir suivre en caméra portée les acteurs entre les troncs enflammés. Le résultat est stupéfiant puisqu’il plonge le spectateur au cœur de l’action tout en lui suggérant une variété d’émotions intenses : la créativité infuse chaque plan comme, par exemple ces scintillements semblants issus des diamants. La narration de La Lettre inachevée suit les transformations de la nature au gré des saisons : la première partie estivale est consacrée à la recherche des gisements de diamants au cours de laquelle se développe un triangle amoureux (le guide est attiré par la jeune Tanya qui est amoureuse d’Andrey), puis l’hiver et le drame vont monopoliser la seconde partie. La Lettre inachevée est l’histoire de solides oppositions, entre l’homme et la nature, l’amour et la pulsion sexuelle, l’adversité et la flamme patriotique. Le génie de Mikhaïl Kalatozov est d’avoir su outrepasser le caractère propagandiste de cette histoire (échos lointains des autorités via la radio bientôt hors d’usage) par l’énergie consacrée au filmage et par son art consommé de l’allusion allégorique et visuelle (analyse de la menace de viol : cf. bonus) dont le lyrisme tempère le caractère décourageant du récit. Bien plus qu’un film d’aventure à suspense, La Lettre inachevée est une œuvre fascinante, quasi expérimentale (usage expressionniste des fondus et surimpressions), conçue pour déclencher chez le spectateur les émotions, aussi effrayantes (panique de l’échec qui est survoltée par le mouvement de la caméra…) que romanesques (illusion de Diamantville…), analogues à celles éprouvées par les personnages. Une réalisation sensorielle à ne pas manquer.

 

Blu ray La Lettre inachevee

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Commentaire technique

Restauration 4K en 2020 à partir de l'interpositif au laboratoire Mosfilm Cinema Concern (producteur de la restauration : Karen Shakhnazarov) : suppression et corrections des défauts dus à l’usage et au stockage du négatif (tremblements, scintillements, taches, rayures, éraflures, etc.). Les choix artistiques ont compliqués la restauration : plans avec flammes, caméra en mouvement avec changement abrupt d’arrière-plan. Utilisation du programme Phoenix dont le mode de nettoyage automatiques a supprimé 30 à 50 % des défauts sur les 135 000 images. Autres difficultés avec les rayures, notamment des lignes verticales noires épaisses (à droite presque tout au long du film) et avec les fines éraflures décolorées irrégulières impossibles à traiter autrement que manuellement avec PFClean et filtre Fix Scratch.

Image : copie HD, définition impressionnante et piqué remarquable, texture argentique extrêmement fine (tournage en 35 mm, Master Format 4K), image stabilisée et parfaitement nettoyée, gestion remarquable des contrastes dans les séquences aux éclairages compliqués (feu dans la taïga, neige), noirs denses, échelle des gris harmonieuse, blancs nuancés

Son : mixage russe 2.0 monophonique, dialogues clairs, pas de distorsion ou de souffle appuyé, très bonne dynamique sur les ambiances (sondages manuels, incendie, cris…)

Notre avis

Image : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rouge(5/5)
Mixage sonore : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile grise(4/5)
Bonus : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile demi rougeetoile grise(3,5/5)
Packaging : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile griseetoile grise(3/5)

IMDb : https://www.imdb.com/title/tt0053106/

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