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Reportage : Presqu’île de Crozon - Festival Quatuor à l’Ouest - quatrième et dernière journée

Dimanche 12 mai

Le dernier jour du festival Quatuor à l’Ouest se présente sous des auspices encourageants. Pendant que le reste de la France grelotte ou attend des inondations, la presqu’île de Crozon, sans être caniculaire, est toujours aussi agréable.
La journée commence à Morgat, au CCAS, traduisons : au centre communal d’action sociale. Dieu, que ces sigles sont laids, surtout quand il s’agit de celui qui domine cette charmante plage dépendant de Crozon.

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Il est onze heures du matin et c’est la présentation du concert des stagiaires. En effet, outre les concerts, le festival compte de nombreuses animations et activités pédagogiques avec les écoles et les volontaires. C’est ainsi qu’un luthier de Rosporden, Jean-Louis Blivet, a montré les étapes de son travail, que les éditions Buissonnières ont mis en place une exposition très impressionnante sur leur métier d’éditeur de musique, que des classes ont travaillé sur l’illustration sonore et étudié l’univers de la musique de chambre.
Aujourd’hui, pour quelques-uns, c’est le grand jour. C’est tout d’abord Marine Sonnic, une jeune violoncelliste qui vient nous jouer un morceau en soliste. Elle reviendra d’ailleurs plusieurs fois, nous interpréter du Jean-Sébastien Bach, par exemple, car elle est loin, très loin, d’être une débutante.

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Ensuite vient le quatuor Terenez, qui nous joue un extrait du quatuor n°2 opus 20 de Josef Haydn (Hob.III.32) si vous voulez le trouver en CD. L’opus 20, c’est celui des Quatuors du Soleil, les Sunquartetten, comme on les appelle. Une interprétation amateur de qualité.

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Vient ensuite un quatuor constitué pendant le stage par quatre volontaires qui se sont baptisées par autodérision les Green Tomatoes tant elles se sentent peu mûres pour jouer un quatuor.  Elles s’attaquent avec beaucoup de bonne volonté à un mouvement d’un quatuor de jeunesse de Josef Haydn tiré de l’opus 9. De légers cafouillages, mais cela montre aux spectateurs à quel point jouer un quatuor, même simple, n’est jamais gagné d’avance, alors que dire de ce que réalisent les grands quatuors de nos CDs ? Elles enchaînent, sous les applaudissements compréhensifs des spectateurs, avec une Samba du Grillon, aux pizzicatti plus ludiques.

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Le groupe suivant est un quintette, qui s’appelle les Cinq Hopettes ou Syncopettes. Ces cinq jeunes filles vont nous offrir un quintette à deux altos de Michael Haydn, j’ai bien dit Michael, le petit frère de Josef. Une œuvre bien choisie dans la quantité de compositions de ce musicien prolixe, mais qu’on ne joue plus guère. Les Cinq Hopettes s’en sortent plutôt bien et enchaînent sur une Cumparsita curieusement arrangée.

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C’est ensuite le quatuor Amenecer, de Rennes, quatre musiciens qui ont l’habitude de jouer ensemble et qui nous interprètent deux mouvements du quatuor de Verdi, que nous avons entendu avant-hier, sublimement interprété par le quatuor Hermès (voir article). La différence saute aux oreilles, bien évidemment, mais je trouve que ce quatuor amateur s’en sort plutôt bien, car il n’est pas facile de se mesurer aux géants.

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Enfin, Alain Brunier, qui a dirigé l’Académie pour les stagiaires, organisé les répétitions et prodigué ses conseils (c’est un brillant violoncelliste enseignant aujourd’hui au CRD de Brest), en a profité pour tous les réunir dans un ensemble éphémère, baptisé L’Orchestre à l’Ouest, et ils nous interprètent le largo et l’allegro d’une pièce de Vivaldi. Et ça marche ! Le public est euphorique de voir et d’entendre une si belle réalisation amateur.

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Après nous être restaurés à Morgat (je vous conseille la pizzeria Della Spaggia, juste face à la plage), nous allons à Landévennec, dans l’Abbaye Saint-Guénolé reconstruite  en 1958, non loin des ruines de l’ancienne abbaye qui, elle, datait, dit-on du Vème siècle.
Là, le Consort de la Belle Feuille nous donne à entendre ce qui est, en quelque sorte, l’ancêtre du quatuor à cordes, un consort de violes de gambes. Avant l’apparition du violon, vers 1520, c’est à ces instruments qu’était dévolue une grande partie de la musique.
Nima ben David et Andreas Linos (dessus et basse de viole), Marie Susan Deloye (ténor et basse de viole) et Mélusine de Pas (basse de viole et chant), nous offrent tout d’abord des pièces mélancoliques et tristes de John Dowland (1563-1626), puis de Captain Tobias Hume (~ 1569-1645). Et elles enchaînent immédiatement sur les Danses et Hymnes sacrées recueillies par Gurdjieff et de Hartmann. Ici, parenthèse orthographique digne de Bernard Pivot : hymne est masculin quand il parle du profane (des hymnes guerriers) et féminin quand il parle du religieux (des hymnes chrétiennes). Que faire à propos de ces hymnes peu catholiques, apostoliques ni romaines ? Par œcuménisme, je dis « elles ». Qu’en pensez-vous, vous ? Fin de la parenthèse et revenons à Gurdjieff, dont les théories théosophiques plus que fumeuses n’enlèvent rien à ses qualités musicologiques. Les huit morceaux recueillis (ou composés ?) en 1925 se prêtent fort bien à être joués par un consort de violes et sont très agréables à l’oreille. A l’époque, ils ouvraient la musique classique européenne, tout comme le faisaient Darius Milhaud et d’autres, aux musiques extra-européennes et paraissaient fort novateurs. Aujourd’hui, cela l’est sans doute moins, mais l’interprétation du Consort de la Belle Feuille lui vaudra un rappel où il redonnera « Les Pleureuses assyriennes », sans doute le morceau le plus touchant.

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Si nous devions faire un bilan de ce festival étonnant, il serait extrêmement positif. Fort varié bien que centré sur un objet qui, a priori, peut paraître l’être très peu (Les Quatuors à Cordes), ce festival, grâce à une programmation fort habile, se révèle multiforme et panaché, mélange adroitement des ensembles brillants et connus avec d’autres plus discrets, plus locaux et moins médiatisés, procède à un travail pédagogique de fond vers les écoles et maintient un très haut niveau de qualité artistique sans jamais lasser le public.
Tout cela, dans une région magnifique et avec des bénévoles d’une amabilité exquise. Que voudriez-vous en plus ?

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www.quatuoralouest.org



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