La Colombe blanche - Le Piège du diable : les premiers longs métrages fascinants de Frantisek Vlácil (en Blu-ray et DVD)

Note artistique : 



(4/5)
Synopsis
La Colombe blanche : au nord de la Belgique, un lâcher de pigeons voyageurs est organisé. Au même moment, sur les bords de la mer Baltique, la petite Susanne attend le retour de sa colombe blanche. Mais l'oiseau a été dérouté par une tempête et se retrouve à Prague, se reposant sur un toit. Un jeune garçon infirme, Michal, tire l'oiseau à la carabine. Pris de regrets, il l'emmène au peintre Martin qui va tenter de le soigner. La guérison de l'oiseau ira de pair avec celle de Michal, tandis que Susanne, ne le voyant pas revenir, se met à dépérir.
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Le Piège du diable : Moravie, fin du XVIe siècle. Entre deux ravages des troupes suédoises et des périodes de sécheresse, le meunier Mlynár jouit d'une certaine popularité auprès des habitants de son pays. Il est serviable, et a, en outre, le don de trouver les sources. Le régent Valce, jaloux de la position du meunier, va faire courir des rumeurs sur ce dernier : il ne peut qu'être épaulé par le Diable. De plus, il va mandater un prêtre, Probus, afin de mener une enquête sur lui et sa famille.
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- Titre original : Holubice - Dáblova past
- Support testé : Blu-ray
- Genre : poétique drame
- Année : 1960, 962
- Réalisation : Frantisek Vlácil
- Casting : (1) Katerina Irmanovová, Karel Smyczek, Vjaceslav Irmanov, Gustav Püttjer, Hans-Peter Reinecke, Frantisek Kovárík, Ladislav Fialka, Jirí Patocka (2) Vítezslav Vejrazka, Miroslav Machácek, Cestmír Randa, Vít Olmer, Karla Chadimová, Vlastimil Hasek, Frantisek Kovárík, Jaroslav Moucka
- Durée : 1 h 09 mn 32 - 1 h 28 mn 50
- Format vidéo : 16/9
- Format ciné : 1,37/1 Noir et Blanc
- Sous-titrage : français
- Pistes sonores : LPCM 2.0 monophonique tchèque
- Bonus sur le Blu-ray de La Colombe blanche : Digipack avec le Blu-ray du film (69 mn 32) et le DVD du film (66 mn 44) - Colombe blanche et choit noir, présentation du film par Christian Lucas (2024, 25 mn 49) - diaporama d'affiches et photographies (1 mn 00)
- Bonus sur le Blu-ray de Le Piège du diable : Digipack avec le Blu-ray du film (88 mn 50) et le DVD du film (85 mn 17) - Le Piège de Vlacil, présentation du film par Christian Lucas (2024, 24 mn 44) - diaporama d'affiches et photographies (1 mn 06)
- Éditeur : Artus Films
Commentaire artistique
Après avoir édité deux films emblématiques et médiévaux du cinéaste tchèque Frantisek Vlácil, Marketa Lazarová (1967) et La Vallée des abeilles (1968), l’éditeur nous propose, en éditions séparées, ses deux premiers longs métrages La Colombe blanche, réalisé en 1960, et Le Piège du diable en 1962. Ces deux œuvres témoignent du talent inné de l’artiste, scénariste et peintre, pour la réalisation cinématographique qu’il va mettre en pratique durant son service militaire. Alors que ses collègues réalisateurs tentent d’échapper au réalisme, un courant novateur qui débouchera sur la Nouvelle vague tchécoslovaque amorcée par un film de Štefan Uher en 1962, Frantisek Vlácil préfère tracer sa route indépendamment, loin des courants et des écoles qui agitent les milieux du 7ème Art. Sa vision artistique, façonnée par des études d’art et d’esthétique, est amorcée dès 1958 avec le court-métrage Sklenená oblaka, qui précède les recherches visuelles de son premier film La Colombe blanche.
La Colombe blanche est au départ une commande des studios Barrandov qui a bien du mal à aboutir. C’est finalement le jeune Frantisek Vlácil qui va hériter du projet et dispose de la liberté de réécrire le scénario inspiré d’une nouvelle « Susanne » d’Otaka Kirchner. C’est avant tout une belle histoire pacifiste d’amitié et de fraternité, symbolisée par une colombe blanche qu’un jeune handicapé de Prague blesse puis recueille et qu’une jeune fille solitaire sur un rivage de la mer baltique attend. Le film qui en résulte, tourné en Prague et en RDA, va devenir un manifeste artistique (le personnage du plasticien Martin joué par Vjaceslav Irmanov n’est absolument pas anodin) inattendu et mémorable prônant en filigrane la liberté créatrice. En effet, si tous ces personnages, y compris le peintre Martin, vivent en marge du système laissant présager une prise de position « politique » du cinéaste, c’est avant tout l’audace esthétique de son film qui fascine. La beauté de l’image et la sophistication des cadrages de Jan Čuřík donnent à ce drame une dimension poétique et symbolique qui transcende son récit et lui confère une portée universelle non exempte de spiritualité (plan final). Tout en ancrant sa vision dans la réalité triviale de ses lieux de tournage, une plage et un immeuble, La Colombe blanche use avec brio des possibilités techniques d’éclairages et d’angle de pise de vue, et des leçons de l’expressionnisme pour suggérer des émotions et renforcer la caractère énigmatique de cette fable. Outre la force esthétique qui émane de La Colombe blanche, il faut saluer la photogénie de ses jeunes acteurs, Katerina Irmanovová, (Susanne) et Karel Smyczek (Michal) et la qualité émotionnelle de la partition sensible de Zdenek Liska. Avec ce premier long métrage inoubliable, Frantisek Vlácil affirmait son indépendance créatrice et son talent d’auteur.
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Si son film suivant, Le Piège du diable, semble moins porté sur l’esthétisme, son contenu défend les mêmes intentions de se tenir à l’écart du discours officiel. Ce film est le premier opus d’une trilogie dite « historique » qui se poursuivra avec Marketa Lazarová et La Vallée des abeilles. Dès ce premier film, Frantisek Vlácil aborde frontalement les rapports complexes qui coexistent entre le pouvoir religieux et le pouvoir séculier, ici symbolisés par le jésuite Kaplan Probus, incarné par Miroslav Machácek, et le régent joué par Cestmír Randa, qui se doublent du fossé social séparant la noblesse et le peuple avec le personnage réfléchi du meunier Mlynár fort bien interprété par Vítezslav Vejrazka. Le sujet est également une adaptation très lointaine d’un roman tchèque de 1956 : « Mlýn na ponorné řece » (« Le Moulin sur la rivière submergée ») d’Alfred Technik. Pour cette nouvelle commande des studios Barrandov, le cinéaste remanie le scénario déjà ficelé et simplifie la trame historique pour mieux développer ses personnages. Plus porté à favoriser l’irrationnel diabolique et le mystère (cavités souterraines), il fera la concession d’une romance dispensable pour mieux attirer le public. La photographie, signée par Rudolf Milic, atteste du penchant du cinéaste pour les vues improbables et les images à l’esthétique recherchée, mais réalisateur sait habilement les mettre au service de son récit sans jamais verser dans l’esthétique ostentatoire. Le spectaculaire affaissement d'une construction, une séquence vraiment impressionnante, s’inscrit ainsi comme indispensable à l’intrigue par ailleurs nourrie d’une critique à peine voilée du pouvoir (un tour de force dans un régime communiste à la censure facile). Demeuré inédit en France Le Piège du diable mérite d’être découvert : ce premier film réussi contient en germe toutes les intentions artistiques qui vont trouver leur aboutissement dans l’admirable opus historique suivant : Marketa Lazarová.
Commentaire technique
La Colombe blanche
Image : copie HD, excellente définition et piqué remarquable sur les détails, texture argentique fine (tournage en 35 mm, Master Format 2K), image bien nettoyée pas exempte de petits défauts (taches, rayures), beau contraste qui restitue à merveille les éclairages tranchés de Jan Čuřík, blancs nuancés, noirs soutenus, gris bien étagés
Son : mixage 2.0 monophonique tchèque, voix claires et équilibrées, belle dynamique sur les ambiances (rivage, immeuble) et sur la musique typée et sensible de Zdenek Liska, pas de distorsion ou de souffle intempestif
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Le Piège du diable
Nouveau transfert 2K à partir des éléments originaux 35 mm conservés par la Czech National Film Archive de Prague
Image : copie HD, définition et piqué variables, plans parfois excellents, texture argentique discrète (tournage en 35 mm, Master Format 2K), contraste variable avec des noirs parfois laiteux, parfois profonds, copie fatiguée avec des rayures (côté droit image) et des taches, des sautes d’images, des repères de changements de bobines, échelle des gris relativement équilibrée
Son : mixage 2.0 monophonique tchèque, dialogues clairs, pas de distorsion mais un peu de souffle et quelques grésillements, belle dynamique sur les effets sonores recherchés et sur la composition musicale quasi expérimentale de Zdenek Liska
Notre avis
Image : La Colombe Blanche (4,5/5) Le Piège du diable
(3/5)
Mixages sonores : (3,5/5)
Bonus : (3/5)
Packaging : (3/5)
IMDb
La Colombe blanche : https://www.imdb.com/fr/title/tt0175743/
Le Piège du diable : https://www.imdb.com/fr/title/tt0054780/
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