Eolomea - Dans la poussière des étoiles : deux films de science-fiction méconnus produits en RDA (en Blu-ray et DVD)

Note artistique : (3/5)

Synopsis

Eolomea : dans un futur proche, les hommes ont colonisé la Lune et d'autres étoiles. La station Margot est le centre de relais le plus important de ces colonies. Un jour, huit astronefs partis en exploration disparaissent, et la liaison avec la station est rompue. Après avoir reçu un message codé déclarant « Eolomea », le professeur Maria Scholl, représentant le Conseil Suprême, ordonne un couvre-feu pour tous les vaisseaux, et se rend elle-même sur Margot pour découvrir ce qui se passe.

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Dans la poussière des étoiles : ayant reçu un appel de détresse provenant de la planète TEM4, le vaisseau spatial Cyrno parvient à s'y rendre, non sans difficultés. Sur place, on fait comprendre à l'équipage qu'il s'agissait d'une erreur. Le chef de la planète invite alors tous les membres du Cyrno à une fête. Seul Suko reste méfiant, et à juste titre : les mines de TEM4 ont besoin d'esclaves…

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Titre original : Eolomea - Im Staub der Sterne
Support testé : Blu-ray
Genre : science-fiction
Année : 1972, 1976
Réalisation : Herrmann Zschoche, Gottfried Kolditz
Casting : (1) Cox Habbema, Ivan Andonov, Rolf Hoppe, Vsevolod Sanaev, Petar Slabakov, Wolfgang Greese, Holger Mahlich, Benjamin Besson (2) Jana Brejchová, Alfred Struwe, Ekkehard Schall, Milan Beli, Silvia Popovici, Violeta Andrei, Leon Niemczyk, Regine Heintze, Aurelia Dumitrescu
Durée : 1 h 22 mn 08 - 1 h 35 mn 53
Format vidéo : 16/9
Format ciné : 2,35/1 (1) - 1,66/1 (2)
Sous-titrage : français
Pistes sonores : LPCM 2.0 monophonique allemand
Bonus sur le coffret de Eolomea : Digipack avec le Blu-ray du film (82 mn 08) et le DVD du film (78 mn 51) - livret « Étoiles rouges et rideau de fer » de Christian Lucas (64 pages) - présentation du film par Christian Lucas (2024, 20 mn 02) - galerie d'affiches et de photos (1 mn 24)
Bonus sur le coffret de Dans la poussière des étoiles : Digipack avec le Blu-ray du film (95 mn 53) et le DVD du film (92 mn 03) - livret « Rouges sont les galaxies » de Christian Lucas (64 pages) - présentation du film par Christian Lucas (2024, 24 mn 02) - galerie d'affiches et de photos (2 mn 24) - bande annonce originale (VO, 2 mn 54)
Éditeur : Artus Films

Commentaire artistique

Présentés dans des coffrets incluant un combo Digipack et un copieux livret explicatif, Eolomea (1972) et Dans la poussière des étoiles (1976) sont deux films produits et tournés de l’autre côté du rideau de fer en ex-RDA et qui ont fait l’objet d’une restauration 2K par la DEFA (Deutsche Film AG), l’ancien studio et centre de production cinématographique public de la République démocratique allemande (1946-1990). La DEFA a été reconverti en 1998 en fondation à but non lucratif basée à Berlin par le gouvernement fédéral allemand qui lui a attribué les anciens films de la DEFA avec la mission de les préserver et de les diffuser. Ces deux films appartiennent, selon l'expression d'un des livrets suppléments, à l’âge d’or du « Space Opera rouge », c’est tout dire…

Sorti en 1972, Eolomea est un film de science-fiction réalisé par Herrmann Zschoche. Cette coproduction entre l'Allemagne de l'Est, la Bulgarie et l'Union soviétique a été adaptée d’un roman homonyme d'Angel Wagenstein. L’intrigue futuriste est assez inégale, plus diserte qu’active, développant trop longuement la romance qui réunit la scientifique Maria Scholl, incarnée par l’actrice néerlandaise Cox Habbema, et le pilote anticonformiste Daniel Lagny, joué par le bulgare Ivan Andonov et insistant lourdement sur le personnage du robot farceur aux gags pesants, un vague succédané de ceux de Star Wars. Le meilleur de l’histoire réside dans la personnalité intéressante du professeur Olo Tai joué par l’allemand Rolf Hope et dans le fossé qui sépare les bureaucrates établis des jeunes scientifiques rêveurs en route pour une nouvelle planète avec une constatation politique assez surprenante : l’humanité (communiste) ne pourra progresser qu’en s’affranchissent de la rigidité de ses lois. Mais étonnamment, la vision « marxiste » de l’intrigue reste relativement modérée, se limitant à une propagande discrète affirmant la priorité de l’entreprise générale sur le destin individuel. Utopie non dénuée de romantisme, Eolomea sera une grosse production filmée en 70 mm stéréophonique à la mesure de ce space-opéra qui ne manque pas d’envergure visuelle. Certes les maquettes et les costumes rutilants ont franchement vieilli, mais leur esthétique désuète contribue au charme nostalgique qui se dégage au détour de chaque plan de cette réalisation naïvement kitsch. Cependant, en dépit de scènes qui rappellent 2001, l’odyssée de l’espace (1968), Star Wars (1977) ou Solaris (2002), Eolomea ne peut cacher ses origines avec ses décors rustiques sans élégance et ses accessoires (sièges, commandes, casques, etc.) très « soviétiques ». La mise en scène classique d’Herrmann Zschoche, qui se limite à une direction d’acteurs conventionnelle et presque sans humour (hormis le robot ahuri), explique le cruel manque de souffle de cette épopée spatiale. Filmé en Bulgarie (plage) et à Babelsberg (studios), Eolomea constitue un film de genre typé assez bavard, pas vraiment palpitant, et aux effets spéciaux rudimentaires, mais au charme visuel indéniable…

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En 1976, le cinéaste de la RDA, Gottfried Kolditz réalise Dans la poussière des étoiles dont il a coécrit le scénario avec Joachim Hellwig. Le cinéaste s’était déjà illustré dans le genre en dirigeant en 1961 Signal, une aventure dans l'espace. Tourné en Roumanie (paysages, mines de sel… de sinistre réputation sous le régime de Nicolae Ceausescu) et à Babelsberg (studios), par Peter Süring sur pellicule Orwo avec sa colorimétrie particulière, ce film de science-fiction est un autre témoin du genre tel qu’il était conçu dans le bloc communiste. En effet l’intrigue imagine, sur une planète éloignée, l’existence d’une société en apparence joyeuse qui masque une terrible réalité : les autochtones Turis sont devenus des esclaves condamnés à exploiter les mines souterraines pour le compte de leurs nouveaux maîtres, les Témiens, experts en manipulation psychologique. Le symbolisme du récit est limpide : sous l’apparence d’une histoire futuriste utopique, Dans la poussière des étoiles ne ménage pas sa critique du capitalisme et la multiplication des symboles empesés: colonisation totalitaire, asservissement de populations « indiennes » (cf. personnage de Chta incarné par Aurelia Dumitrescu), emprise psychique. Le casting est entièrement recruté à l’Est avec les tchèques Jana Brejchová (commandante Akala) et Milan Beli (Ronk), la roumaine Violeta Andrei (ingénieure Rall), l’allemand de l’est Alfred Struwe (navigateur Suko), etc. Dernier film de science-fiction de la DEFA, Dans la poussière des étoiles est le condensé d’un genre malmené par son esthétique clinquante, par son évocation démodée (costumes kitsch, accessoires datés, décors inélégants, etc.) et par ses chorégraphies d’un autre temps. Dans l’optique communiste, le récit féministe traite les protagonistes, femmes et hommes, sur un pied d’égalité et ne semble pas scandalisé par l’audace de quelques scènes dénudées (surprise : la psychologue Thob jouée par Regine Heintze nous gratifie d’une danse nue sans rapport avec le reste du film !). Réalisé une année avant la révolution Star Wars de 1977, Dans la poussière des étoiles semble avoir su s’imprégner d’influences « occidentales » : il a été noté que si le film décrit un univers parfois voisin du film pop Barbarella (1968), on peut aussi déceler d’autres sources comme Star Trek rappelé par ce récit d’un équipage débarquant sur une planète inconnue. Malgré un étonnant mélange de genres, ce film résolument de science-fiction au look nostalgique est un bel exemple de l’approche « communiste » de la science-fiction consistant à ne jamais perdre de vue les fondamentaux politico-économiques largement relayés par la charge symbolique du récit et de ses personnages. Une curiosité qui vaut la vision !

Commentaire technique

Eolomea

Image : copie HD, excellente définition avec un piqué remarquable sur les détails « futuristes », texture argentique fin au grain discret et homogène (tournage 70 mm, Master Format 2K restauré), présente en 2.35/1 et pas au format original de 2,20/1, copie très propre, superbe contraste aux éclairages généreux et francs, noirs profonds, étalonnage chaud naturaliste (procédé Orwo), colorimétrie éclatante aux teintes vives rehaussant l’esthétique kitsch du tournage, tons saturés

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Son : mixage 2.0 monophonique allemand au lieu des 6 pistes stéréo de la copie 70 mm, voix claires mais résultat étriqué (il existe pourtant une version 5.1), bonne dynamique sur les effets sonores spatiaux et sur la musique pop futuriste de Günther Fischer, pas de distorsion ou de souffle

Dans la poussière des étoiles

Image : copie HD, une belle définition avec du piqué sur les détails, texture argentique discrète et homogène (tournage en 35 mm, Master Format 2K restauré), copie bien nettoyée, excellent contraste, éclairages francs, noirs denses, étalonnage chaud, colorimétrie vive avec des teintes pastel délicates et nuancées de la pellicule Orwo

Son : mixage 2.0 monophonique allemand, dialogues clairs, pas de distorsion ou de souffle marqué, bonne dynamique sur les ambiances et la musique enlevée de Karl-Ernst Sasse