Delphine Seyrig. Coffret « Je ne suis pas une apparition, je suis une femme » : une comédienne engagée (en Blu-ray)

Note artistique : (4,5/5)

Synopsis

La Musica : un couple divorcé se retrouve dans une chambre d’hôtel pour discuter de leur relation passée, explorant ainsi les complexités de l’amour

Les Lèvres rouges : un jeune couple fait étape dans un palace d’Ostende déserté. La mystérieuse comtesse Bathory et sa protégée les y rejoignent…

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Le Jardin qui bascule : un jeune tueur à gages devient l’amant de la femme qu’il est chargé d'assassiner…

Aloïse : l’histoire vraie d’Aloïse Corbaz, jeune fille d'origine modeste qui souhaitait devenir cantatrice, mais que la première guerre troubla au point d’être internée dans un hôpital psychiatrique où elle va se révéler par la peinture

Jeanne Dielman 23, Quai du commerce, 1080 Bruxelles : trois jours hyper réglés de la vie d’une mère au foyer, entre tâches ménagères et prostitution

Sois Belle et tais-toi ! : des actrices célèbres parlent de leur rôle au cinéma et de l'exigence d'être belle et de se taire

Titre français : La Musica - Les Lèvres rouges (VO : Daughters of Darkness) - Le Jardin qui bascule - Aloïse - Jeanne Dielman 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles - Sois belle et tais-toi !
Support testé : Blu-ray
Genre : drame, horreur, documentaire
Année : 1967, 1971, 1975, 1975, 1976, 1981
Réalisation : Marguerite Duras et Paul Seban, Harry Kümel, Guy Gilles, Liliane de Kermadec, Chantal Akerman, Delphine Seyrig et Nadja Ringart, Delphine Seyrig
Casting : Delphine Seyrig (1) Robert Hossein, Julie Dassin, Gérard Blain (2) John Karlen, Danielle Ouimet, Andrea Rau, Paul Esser, Georges Jamin (3) Anouk Ferjac, Patrick Jouané, Sami Frey, Philippe Chemin, Guy Bedos, Jeanne Moreau, Caroline Cartier, Howard Vernon, Pierre Fabre (4) Isabelle Huppert, Marc Eyraud, Michael Lonsdale, Monique Lejeune, Julien Giomar, Roger Blin (5) Jan Decorte, Henri Storck, Jacques Doniol-Valcroze, Yves Bical (6) Jill Clayburgh, Marie Dubois, Delia Salvi, Juliet Berto, Patti D'Arbanville, Maidie Norman, Louise Fletcher, Jane Fonda, Cindy Williams, Rita Renoir, Jenny Agutter, Luce Guilbeault, Anne Wiazemsky, Rose Gregorio, Maria Schneider, Viva, Candy Clark, Barbara Steele, Millie Perkins, Mallory Millett-Jones, Susan Tyrrell, Ellen Burstyn
Durée : 1 h 26 mn 11 - 1 h 40 mn 08 - 1 h 32 mn 28 - 1 h 57 mn 18 - 3 h 21 mn 48 - 1 h 53 mn 16
Format vidéo : 16/9
Format ciné : 1,66/1 Noir et Blanc (1, 6), 1,66/1 Couleur (2, 4, 5), 1,37/1 Couleur (3)
Sous-titrage : français
Pistes sonores : DTS-HD MA 1.0 français monophonique (tous), anglais (6)- DTS-HD MA 5.1 et 2.0 anglais (2)
Bonus sur le Blu-ray de La Musica : un regard par Virginie Apiou (2023, 9 mn 16) - Sur le tournage à Évreux (1966, 5 mn 29) - Marguerite Duras et La Musica (20 février 1967, 4 mn 00) - la photographie (20 décembre 1968, 11 mn 35)
Bonus sur le Blu-ray de Les Lèvres rouges : un regard par Virginie Apiou (2023, 7 mn 08) - entretiens avec Delphine Seyrig (9 décembre 1971, 9 mn 11) et Harry Kümel (2022, 9 mn 46)
Bonus sur le Blu-ray de Le Jardin qui bascule : un regard par Virginie Apiou (2023, 9 mn 29) - Masculin, féminin (1975, 3 mn 52) - Delphine Seyrig, témoin surpise (13 octobre 1972, 2 mn 48) - Delphine Seyrig chante « Une fourmi et moi » (18 janvier 1971, 4 mn 32) - bande annonce originale (1 mn 32)
Bonus sur le Blu-ray de Aloïse : un regard par Virginie Apiou (2023, 8 mn 13) - cinéma au féminin (19 avril 1975, 16 mn 29) - Qui donc a rêvé de Liliane de Kermadec restauré en 4K en 2022 (1965, 37 mn 00) - entretien avec Delphine Seyrig (1979, 3 mn 42) - bande annonce originale (2 mn 39)
Bonus sur le Blu-ray de Jeanne Dielman : un regard par Virginie Apiou (2023, 10 mn) - court métrage Saute ma ville de Chantal Akerman (1968, 13 mn 01) - entretien avec Natalia Akerman (2006, 28 mn 14) - entretien avec Babette Mangolte, cheffe opératrice de Jeanne Dielman (2007, 22 mn 41)
Bonus sur le Blu-ray de Sois belle et tais-toi ! : Delphine Seyrig, vidéaste ! par Virginie Apiou (2023, 13 mn 41) - Maso et Miso vont en bateau (1975, 1,37/1 Noir et Blanc, 54 mn 52) - S.C.U.M. Manifesto (1976, 1,37/1 Noir et Blanc, 27 mn 55)
Éditeur : Arte Éditions

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Commentaire artistique

Arte consacre le coffret de six films et deux courts-métrage Delphine Seyrig. Coffret « Je ne suis pas une apparition, je suis une femme à l’actrice Delphine Seyrig disparue en 1980. Le titre est emprunté à une réplique de Baisers volés (1968)… qui n’est pas présent dans ce coffret dont tous les films, édités en Blu-ray, ont été restaurés en 2K ou 4K. A contrario de son image publique de star, acquise dès son deuxième film L’Année dernière à Marienbad (1960), l’actrice n’a cessé de déjouer les attentes et a toujours préféré les prises de risque assumées à la facilité de rôles conformistes et formatés. Parmi la quarantaine de films qu’elle a interprétés, cette collection éclectique permettra d’approcher (très partiellement) sa personnalité complexe de l’actrice, autant comédienne accomplie que rebelle et féministe.

Après les deux œuvres phares d’Alain Resnais, avec La Musica (1967) de Marguerite Duras, Delphine Seyrig tourne pour la première fois avec une femme synonyme de modernité. Assisté de Paul Seban, le premier film de la romancière est adapté de sa pièce montée en 1965 : l’actrice y incarne la femme divorcée qui retrouve son ex (Robert Hossen) et qui cherche à comprendre les causes de leur rupture. En 1971, changement radical de style puisque dans Les Lèvres rouges (1971) d’Harry Kümel, elle interprète la comtesse « sanglante » Elizabeth Bathory : le scénario improbable est sublimé par les recherches esthétiques du cinéaste, dignes du giallo, et par la silhouette mémorable et fascinante de la comédienne. En 1975, elle est à l’affiche du long métrage de Guy Gilles Le Jardin qui bascule et de celui de Liliane de Kermadec, Aloïse, deux films très différents. Le premier est une sorte de film noir qui reflète le style singulier de son cinéaste, surtout enclin à créer une atmosphère envoûtante plutôt que de diriger un film à suspense : l’actrice y joue une aventurière irrésistible qui séduit son tueur. Le second est un biopic sur Aloïse Corbaz, une femme suisse qui, dans son asile psychiatrique, est devenue une artiste majeure de l’Art brut selon Jean Dubuffet. Si Isabelle Huppert l’incarne jeune et rebelle, Delphine Seyrig va lui apporter toute son intensité à la jouer adulte dans une performance très Actors Studio totalement distante de son image d’actrice éthérée. Et c’est encore avec une réalisatrice dont elle se sent complice, Chantal Akerman, que la comédienne va jouer Jeanne Dielman 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles (1976), une veuve au foyer qui alterne les taches ménagères et la prostitution. Un rôle mutique de femme coincée par sa condition (inspirée de la mère de la réalisatrice) qui n’existe que par l’éternelle et immuable répétition de son quotidien : tragique, dépressive et fascinante, Delphine Seyrig est l’interprète idéale de ce film classé comme un des meilleurs du 7ème Art.

En 1974, Carole Roussopoulos crée avec Delphine Seyrig, Ioana Wieder et Nadja Ringart, l’association « Les Muses s’amusent » renommée « Les Insoumuses » et consacrée à la défense de la cause des femmes par la création vidéo. Le collectif réalise deux courts métrages (cf. bonus), Maso Et Miso vont en bateau (1975) et S.C.U.M Manifesto (1976) avant que Delphine Seyrig ne passe derrière la caméra pour mieux exprimer ses convictions en réalisant Sois Belle et tais-toi ! (1981), une suite austère d’interviews statiques, filmées à Hollywood, puis à Paris, donnant la parole à diverses actrices plus ou moins connues racontant la sempiternelle dépendance masculine du milieu. Avec ce documentaire prophétique, son unique réalisation, Delphine Seyrig réglait ses comptes avec l’image de la star fantasmée par les hommes et affirmait avec détermination sa volonté d’être une femme active, ce que son combat incessant pour soutenir toutes les luttes féministes (manifeste des 343, MLF, etc.) dès les années 70 a toujours confirmé.

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Commentaire technique

Tous les films sont des versions restaurées : La Musica en 4K en 2023 à partir des négatifs originaux par Hiventy, Les Lèvres rouges en 4K en 2023, Le Jardin qui bascule, en 4K en 2023 à partir des négatifs originaux 16 mm, image et son, Aloïse, en 2023 en 4K à partir du négatif image 35mm et des bandes magnétiques son français, Jeanne Dielman 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles, en 2K, Sois belle et tais-toi !, en 2K par la BNF à partir de la numérisation des deux bandes 1 pouces IVC (tournage en ½ pouces EIAJ)

Image : copies HD, très bonne définition et piqué sur les détails excepté Sois belle et tais-toi ! sur bande vidéo beaucoup plus imprécis, textures argentiques variables, parfois épaisses (Les Lèvres rouges), copies stabilisées et très bien nettoyées, bon contraste, images lumineuses, noirs profonds (sauf Sois belle et tais-toi !), étalonnages chauds et colorimétries naturalistes, parfois aux teintes vives et tons saturés (Les Lèvres rouges)

Son : mixages français 1.0 monophoniques, voix claires, pas de distorsion, bonne dynamique sur les ambiances et les musiques, spectre limité et souffle (Sois belle et tais-toi !)

Son du film Les Lèvres rouges : mixage anglais 5.1, dialogues équilibrés, excellente dynamique sur les ambiances, spatialisation aux effets surrounds efficaces, LFE ponctuels ; VF 1.0 monophonique, claire, moins ouverte, bon doublage directement par les acteurs eux-mêmes

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