Rashômon : le premier chef-d’œuvre d’Akira Kurosawa (en Blu-ray)

Note artistique : (5/5)

Synopsis

Pour se protéger d'une pluie diluvienne, trois hommes, un bûcheron, un bonze, un domestique se réfugient sous les ruines d'un vieux portique mal famé, Rashômon, dans l'antique Kyoto. Le bonze et le bûcheron font tour à tour le récit d'une aventure où ils avaient été cités comme témoin. Au total, quatre versions du même événement nous sont données…

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• Titre original : Rashômon
• Support testé : Blu-ray
• Genre : drame
• Année : 1950
• Réalisation : Akira Kurosawa
• Casting : Toshirô Mifune, Machiko Kyô, Masayuki Mori, Takashi Shimura, Minoru Chiaki, Kichijirô Ueda, Noriko Honma, Daisuke Katô
• Durée : 1 h 28 mn 25
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 1,37/1 Noir et Blanc
• Sous-titrage : français (nouveaux sous-titres de Catherine Cadou)
• Pistes sonores : DTS-HD MA 2.0 monophonique japonais
• Bonus : A Testimony As An Image: Rashomon, documentaire de Toshiro Enomoto sur le tournage du film (VOST, 2012, 1 h 25 mn 27) - conversation entre Pascal-Alex Vincent, cinéaste, enseignant à l'université Sorbonne Nouvelle, et Stéphane du Mesnildot, essayiste, journaliste, autour du contexte de production et du tournage (2022, 25 mn 16) - entretien avec Cécile Sakai, professeure des Universités, Université de Paris, spécialiste de la littérature japonaise, autour de Ryûnosuke Akutagawa, auteur des deux nouvelles à l'origine du scénario (2022, 21 mn 41) - Masago aux enfers, analyse de séquence par Frédéric Mercier, journaliste (2022, 13 mn 03) - entretien avec Arthur Harari, cinéaste (2022, 28 mn 41) - bande annonce d'époque (3 mn 28) - bande annonce de la ressortie (1 mn 15)
• Éditeur : Potemkine

Commentaire artistique

Rashōmon (Lion d’or à Venise et Oscar du film étranger) n’est plus à présenter : c’est le film qui assuré la réputation d’Akira Kurosawa, le premier de ses nombreux chefs-d’œuvre, et qui a fait connaitre à l’Occident le cinéma japonais (cf. bonus). L’analyse approfondie du film prouve son extrême réflexion cinématographique (cf. bonus : analyse de séquence) et son avant-gardisme quasi expérimental en matière d’image, de son et de structure narrative (cf. bonus). Pour construire son scénario, qui se déroule à la fin de l’ère Heian (8-12ème siècles), Akira Kurosawa s’est inspiré de deux nouvelles de Ryūnosuke Akutagawa (cf. bonus) parues en 1915 et 1922. Il a « inventé » le principe de la description différenciée de plusieurs protagonistes ayant vécu le même évènement, en l’occurrence : le bandit Tajōmaru joué par Toshirō Mifune, le samouraï Tashehiro par Masayuki Mori et le bucheron Kikori par Takashi Shimura. Les quatre versions des faits - faisant intervenir Masago (Machiko Kyō) l’épouse du samouraï - sont discutées sous le porche en ruine d’une porte de ville par le bucheron, par un quidam égoïste (Kichijirō Ueda) et par un prêtre (Minoru Chiaki). Avec ces points de vue contrastés d’un même fait divers, l’assassinat d’un samouraï, Akira Kurosawa a souhaité montrer que les événements de la vie peuvent être confus et posent la question centrale du « réel » (matériel, sensoriel, psychique, symbolique). Mais on peut y déceler aussi des sous-entendus sur la société et la politique récente du Japon. Avec son directeur photo Kazuo Miyagawa, le cinéaste n’a cessé d’innover visuellement sur ce film : éclairage en forêt avec un miroir, caméra portée, soleil directement dans le cadre, artifices (pluie teintée), usage de plusieurs caméras, etc. Sur le plan narratif, le jeu des temporalités et l’usage du flash-back n’ont d’autre intention que de démontrer que la falsification de la réalité est inhérente à la nature humaine. La richesse esthétique, la sensualité érotique (cf. bonus), la complexité thématique de son contenu et la parfaite maîtrise de sa mise en scène font de Rashōmon une œuvre cinématographique exceptionnelle dont on pourrait gloser à l’infini (cf. bonus). Superbement filmé et interprété avec une rare intensité, ce film témoigne de l’humanisme cher au cinéaste qui, après avoir dépeint la lâcheté humaine, propose au final une note d’espérance. Chef-d’œuvre.

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Commentaire technique

Film restauré en 2008 en 4K par l'Academy Film Archive, le National Film Center of the National Museum of Modern Art, Tokyo et Kadokawa Pictures, Inc. avec le soutien financier de la Kadokawa Culture Promotion Foundation et de la Film Foundation

Image : copie HD, bonne définition globale et piqué certain sur les gros plans de visage, texture argentique discrète et homogène, image très bien nettoyée et stabilisée (tournage en 35 mm, Master Format 4K restauré 2008), le contraste est bon mais pas excellent, image un peu grise et noirs pas toujours soutenus, blancs nuancés, gamme de gris régulière

Son : mixage japonais 2.0 monophonique, très bonne clarté des dialogues équilibrés, pas de distorsion mais léger souffle, bonne dynamique qui profite aux ambiances de pluie (début et fin du film) et à la musique boléro de Fumio Hayasaka