La Croisière jaune : une expédition motorisée légendaire (en Blu-ray et DVD)

Note artistique : (4/5)

Synopsis

Financée par André Citroën, l’expédition de la Mission Citroën Centre-Asie, la Croisière jaune, doit relier Beyrouth à Pékin en véhicules autochenilles. Un premier groupe dirigé par Georges-Marie Haardt quitte le Liban le 4 avril 1931 pour retrouver à mi-chemin un second groupe parti de Pékin sous la conduite de Victor Point. Une quarantaine d’hommes, parmi lesquels des savants et des médecins, vont parcourir trente mille kilomètres à travers le Moyen et l’Extrême-Orient, bravant les intempéries, les défaillances mécaniques et les conflits politiques…

LA SUITE APRÈS LA PUB

• Titre original : La Croisière jaune
• Support testé : Blu-ray
• Genre : documentaire
• Année : 1934
• Réalisation : André Sauvage, Léon Poirier
• Casting : Louis Audoin Dubreuil, Georges-Marie Haardt, Victor Point
• Durée : 1 h 37 mn 41
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 1,37/1 Noir et Blanc
• Sous-titrage : français
• Piste sonore : DTS-HD MA 1.0 monophonique français
• Bonus : coffret livre avec le Blu-ray et le DVD du film - le livre « L'Aventure cinématographique et de La Croisière jaune » (396 pages) : grâce aux archives déposées par la famille d’André Sauvage et au travail de recherche et de reconstitution effectué par Béatrice de Pastre (directrice adjointe du patrimoine cinématographique et directrice des collections du CNC) avec l’appui d’Éric Le Roy (chef du service Accès, valorisation et enrichissement des collections du CNC), cet ouvrage compile les précieuses notes de voyage d’André Sauvage sous la forme d’une correspondance que le cinéaste adresse à son épouse Alice. Véritable carnet de bord illustré par deux riches cahiers composés de photos et d’archives exclusives, cet ouvrage offre un récit de voyage atypique, à l’image de la prodigieuse expédition de la Croisière jaune.
• Bonus : L'Autre croisière d'André Sauvage, images de la Mission Citroën Centre-Asie déposées par André Sauvage en 1975 au CNC (exclusivité Blu-ray, 2022, N&B, 1 h 49 mn 10, muet) : un document inédit sur l’ensemble du travail de collecte cinématographique effectué par l’équipe missionnée par Pathé-Natan à travers la restitution d’images, pour beaucoup inédites, assemblées en suivant la chronologie du voyage et identifiées grâce aux notes de travail et autres archives du cinéaste - 7 courts métrages en version restaurée autour de la Croisière jaune et de son réalisateur André Sauvage : Dans la brousse annamite (1936, N&B, 25 mn 04), L'Afghanistan (1938, N&B, 13 mn 49), La Perse (1938, N&B, 13 mn 44), Images indochinoises (1939, N&B, 18 mn 29), La Croisière jaune (version courte, 1971, N&B, 18 mn 15), Vues du Bois-des-Près - Un été 1977 (1977, couleurs, 9 mn 11, muet), Chez André Sauvage, peintre, musicien, écrivain (1977, couleurs, 8 mn 18, muet)
• Éditeur : Carlotta Films

Commentaire artistique

En avril 1931, le constructeur automobile André Citroën et son vice-président, l’explorateur belge Georges-Marie Haardt, lancent une troisième expédition motorisée succédant à la traversée du Sahara (1922) et la croisière noire (1924). L’objectif, aux retombées commerciales manifestes, est de prouver que la « route de la soie » entre Beyrouth et Pékin (13 000 km) est faisable en véhicules motorisés : un projet innovant jamais tenté jusque-là. Après plus de trois années de préparation et de tractations diplomatiques difficiles avec la Chine nationaliste, la «Mission Citroën Centre-Asie» peut s’élancer. Elle comprend deux groupes : « Pamir » dirigé par Georges-Marie Haardt et Louis Auduin-Dubreuil (trajet ouest vers est) et « Chine » dirigé par Victor Point (trajet est vers ouest). Les deux groupes voyagent en sens inverse et doivent se retrouver dans le Xinjiang avant de joindre Pékin. Le premier groupe est doté d’autochenilles Citroën-Kégresse, six P17 et une P14, le second groupe de modèles P21 plus gros et plus lourds. Pour couvrir l’épopée, Pathé-Natan confie à André Sauvage réalisateur documentariste, artiste-peintre et écrivain, le soin de diriger l’équipe de tournage. Le film La Croisière jaune qu’il va réaliser sera son chant du cygne : André Citroën le désavoue, rachète les droits et confie le film pour un nouveau montage avec une nouvelle musique à Léon Poirier. Ce camouflet stoppe toute activité cinématographique de l’artiste qui finira sa vie comme agriculteur. Néanmoins le film est composé intégralement des images et de sons (hormis le commentaire particulièrement colonialiste où il est souvent question de « nous les Aryens »…) captés sur place par l’équipe dirigée par André Sauvage pour le groupe Pamir : on pourra comparer avec la version qu’il comptait établir (cf. bonus exclusif du Blu-ray). L’artiste s’opposait à la fois au commentaire nationaliste de l'historiographe Georges Le Fèvre et à André Citroën qui lui reprochait de ne pas mettre assez en valeur les autochenilles. Quel que soient les reproches que l’on peut adresser à la version Poirier, les images et les sons qui la composent témoignent d’un authentique exploit physique, humain et mécanique qui culmine avec la traversée des montagnes de l’Himalaya, notamment juste après le col du Gilhit lorsque la route disparue implique de démonter entièrement les véhicules pour transporter les pièces à dos de mule ! Entre documentaire ethnographique, au contenu captivant sur des cultures très éloignées de l’Occident et sur des régions aujourd’hui encore plus troublées politiquement qu’à l’époque (Afghanistan, Pakistan, Irak, Iran, Chine, Indochine, etc.), épopée sportive exigeante nécessitant une endurance à tout épreuve et tragédie, avec le décès de Georges-Marie Haardt le 16 mars 1932, La Croisière jaune demeure un document exceptionnel sur le plan humain, politique et géographique. Outre ce documentaire d’exception, les bonus nous proposent sept court-métrages passionnants d’André Sauvage, eux aussi restaurés, dont cinq autour de cette expédition et un ouvrage copieux de son journal de voyage (correspondance avec sa femme), commenté et annoté, qui en dit long sur l’esprit d’ouverture de l’artiste. Une édition digne des exploits de cette expédition audacieuse et révélatrice des talents artistiques d’André Sauvage.

LA SUITE APRÈS LA PUB

Commentaire technique

André Sauvage fut engagé par Pathé-Natan pour diriger l’équipe cinéma qui filme l’expédition. Toutes les images obtenues firent l’objet d’un prémontage avec commentaire et musique qui ne plut pas à André Citroën. Il confia le film à Léon Poirier qui livra la version connue présente sur ce Blu-ray sans le commentaire d’André Sauvage ni la musique de Maurice Jaubert.
La restauration 2K par le laboratoire Hiventy a été effectuée à partir d’un positif image combiné nitrate de la Cinémathèque Française.

Image : copie HD, bonne définition générale et piqué sur les détails mais texture argentique omniprésente quoique homogène (tournage en 35 mm, Master Format 2K), image d’archive dont tous les défauts n’ont pu être retiré (rayures, fluctuations de densité), très belle restitution du contraste avec des éclairages tranchés, des noirs soutenus et des blancs nuancés, échelle des gris harmonieuse

Son : mixage français 1.0 monophonique, commentaire clair, légère saturation dans les aigus, bonne dynamique, souffle omniprésent mais atténué, spectre limité