Le Conte du tsar Saltan : la délicieuse féerie d’un conte traditionnel russe (en Blu-ray et DVD)
Note artistique : (4/5)
Synopsis
Le tsar Saltan choisit son épouse parmi trois sœurs. Tandis que la cadette devient tsarine, les deux aînées, pleines de jalousie, font tout pour lui nuire. Alors que le tsar est parti guerroyer, la tsarine met au monde le prince Gvidon. Avec l'aide du conseiller du roi, les deux sœurs se débarrassent de la mère et du fils en les faisant jeter à la mer dans un tonneau. Naufragé sur l'île de Bouïane, le prince, vite devenu adulte, sauve un cygne des griffes d'un aigle mais c’est en fait une princesse victime d'un sort et qui va l'aider à faire justice.
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• Titre original : Skazka o tsare Saltane (Сказка о царе Салтане)
• Support testé : Blu-ray
• Genre : fantastique
• Année : 1966
• Réalisation : Alexandre Ptouchko
• Casting : Vladimir Andreyev, Larisa Golubkina, Oleg Vidov, Kseniya Ryabinkina, Nikolai Barmin, Yakov Belenkiy, Nina Belyayeva, Boris Bityukov
• Durée : 1 h 25 mn 04
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 2,20/1 (Sovscope 70) réduit à 2,35/1
• Sous-titrage : français
• Pistes sonores : LPCM 2.0 monophonique russe, français
• Bonus : boîtier Mediabook contenant le Blu-ray et le DVD du film - livre (96 pages) cartonné « Alexandre Ptouchko & le tzar Saltan » par Nicolas Bonnal avec traduction du conte d’Alexandre Pouchkine par Tetyana Popova-Bonnal
• Bonus : Diaporama (1 mn 54) - film-annonce russe (2 mn 19) - films-annonce français (2 mn 19)
• Éditeur : Artus Films
Commentaire artistique
Entre 1830 et 1834, Alexandre Pouchkine offre aux contes populaires russes une élégante forme littéraire, poétique et versifiée. En 1831 il publie « Le Conte du tsar Saltan, de son fils, glorieux et puissant preux le prince Gvidon Saltanovitch et de la très-belle princesse-cygne » qui sera adapté dans le film Le Conte du tsar Saltan. Inspiré (cf. livret) de plusieurs contes traditionnels russes et d’autres sources comme le conte italien « Lancelot, roi de Provins » (1550) repris par Madame d’Aulnoy dans « La princesse Belle-Etoile et le prince Chéri » (1698), « Le conte du tsar Saltan » est un classique de la littérature russe qui raconte les périphéries d’une tsarine dénigrée, de son fils devenu prince d’une île et les félicités de ce royaume insulaire. Ce long poème de 996 vers (cf. traduction dans le livret p. 67-95), qui exprime la lutte éternelle du bien et du mal, a été trois fois porté à l’écran par le cinéma soviétique, deux fois sous la forme d’un film d’animation en 1943 et 1984 et une fois avec acteurs réels dans ce long métrage à gros budget réalisé en 1966 par Alexandre Ptouchko. Ce réalisateur, parfois maladroitement comparé à Walt Disney (on aimerait mieux à Ray Harryhausen), n’est pas suffisamment connu en Occident, malgré deux prix récoltés à Cannes et à Venise (Lion d’Argent). Il suffira de lire le magnifique livret de 96 pages rédigé par Nicolas Bonnal pour se rendre compte de l’importance de ce maestro du fantastique - il occupera le poste de directeur de l’animation à la Mosfilm - au service de la tradition folklorique qui préférera privilégier le merveilleux à la « ligne générale ». Ce choix se révèle aujourd’hui très pertinent puisque le cinéaste apparaît plus comme un fervent conservateur de l’esprit slave que comme un propagandiste politique dont sont parfois accusés certains de ses collègues. Le Conte du tsar Saltan est son avant dernier film et atteste d’un talent au zénith : s’attaquer à ce monument littéraire populaire à la thématique et au symbolisme complexe (cf. analyse détaillée dans le livret) et ce dans la version éminente d’Alexandre Pouchkine était un vrai défi : pari tenu. Pour transposer l’esprit du conte, le réalisateur a choisi de respecter le rythme versifié du poème, accentuant l’ingénuité des personnages, et de lui donner un écrin visuel enchanteur. Le Conte du tsar Saltan est immédiatement perçu comme un spectacle féérique dont la singulière esthétique se révèle fascinante d’autant que la technique à l’ancienne des effets spéciaux opère son charme nostalgique. Photographié en studio en Crimée, avec un extraordinaire travail sur les décors, sur les costumes (inspirés en les stylisant de vêtements byzantin représentés sur des icônes et des mosaïques) et les éclairages, le film est un cocktail de cadrages sophistiqués, de techniques multiples (animation, matte-painting, transparence) et de scènes de foules bigarrées : un livre d’images, à la manière des parchemins enluminés, sublimé par sa chatoyante palette chromatique aux teintes vives aussi attractives qu’improbables. Le cinéaste n’hésite pas à mélanger, dans un même plan, des personnages réels, des animations étonnantes (lions accoudoirs) et des arrière-plans stylisés : rien ne paraît réaliste (fortifications, ennemis, bateaux, etc.) et l’on passe de la trivialité des royaumes terrestres à l’onirisme d’un monde vaporeux en pleine conformité avec l’abstraction du conte : une pure merveille visuelle. Et que dire de l’interprétation parfaitement en adéquation avec la candeur et l’humour du conte dont les péripéties scrupuleusement suivies nous invitent à retrouver notre âme d’enfant. Premier titre de la collection « Chefs-d’œuvre russes », Le Conte du tsar Saltan bénéficie d’un magnifique livret cartonné, riche d’informations/analyses et copieusement illustré, qui est la signature de l’éditeur. Un raison supplémentaire pour ne pas manquer la vision de ce spectacle féerique et enchanteur.
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Commentaire technique
À l’instar de nombreux autres films soviétiques tournés en Sovscope 70, six pistes stéréo (version soviétique du 70 mm) dans les années 70/80, Le Conte du tsar Saltan n’est connu en Occident que dans sa déclinaison amoindrie 2,35/1 : c’est cette version qui a été retenue (probablement la seule restaurée) avec modification du cadre de prise de vue original 2.2.0/1 et perte de la stéréophonie
Image : copie HD, copie restaurée par Mosfilm en 2010, bonne définition globale malgré quelques flous ponctuels, magnifique restitution des textures des superbes costumes et des accessoires, grain argentique conservé, très présent et homogène (tournage en 70 mm, Master Format 2K), image stable et nettoyée de tout défaut (comparer avec le film-annonce), excellente gestion du contraste pour une image lumineuse aux éclairages très bien respectés, étalonnage chatoyant, colorimétrie somptueuse aux teintes chaudes, vives ou pastel, et tons saturés mettant en valeur le travail sur les costumes (Olga Kroutchinina et Sarra Mokil), les décors et la photographie
Son : mixage LPCM 2.0 monophonique russe (au cinéma : version Sovscope 70 mixée sur 6 pistes et Ruscico a édité en 1999 un DVD en 5.1), dialogues clairs et équilibrés, excellente dynamique, pas de saturation ou de bruit de fond, pertes de signal sur plusieurs passages ; VF LPCM 2.0 monophonique, dialogues clairs, doublage soigné (qui réussit le tour de force de parvenir à évoquer la métrique du poème) mais voix trop détachées des ambiances et ne pouvant rivaliser avec le timbre mélodieux des déclamations en russe
Notre avis
Image : (4/5)
Mixages sonores : (3/5)
Bonus vidéo : (1/5) Bonus livret : (4/5)
Packaging : (4/5)
IMDb : https://www.imdb.com/title/tt0174207/
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