Les Funérailles des roses : un film expérimental audacieux et précurseur (en Blu-ray et DVD)

Note artistique : (4/5)

Synopsis

Tokyo, fin des années 1960. Eddie, jeune drag-queen, est la favorite de Gonda, propriétaire du bar Genet où elle travaille. Cette relation provoque la jalousie de la maîtresse de Gonda, Leda, drag-queen plus âgée et matrone du bar. Eddie et Gonda se demandent alors comment se débarrasser de cette dernière…

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• Titre original : Bara no sôretsu
• Support testé : Blu-ray
• Genre : drame
• Année : 1969
• Réalisation : Toshio Matsumoto
• Casting : Pita, Yoshio Tsuchiya, Osamu Ogasawara, Emiko Azuma, Toyosaburo Uchiyama, Don Madrid, Koichi Nakamura, Chieko Kobayashi
• Durée : 1 h 45 mn 11
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 1,37/1 Noir et Blanc
• Sous-titrage : français
• Piste sonore : DTS-HD MA monophonique 1.0 japonais
• Bonus HD : préface de Bertrand Mandico, auteur et réalisateur (6 mn 24) - Eddie roi : entretien avec Pascal-Alex Vincent et Stéphane du Mesnildot (26 mn 24) - bande annonce originale (3 mn 31) - bande annonce 2019 (1 mn 50)
• Éditeur : Carlotta Films

Commentaire artistique

C’est pratiquement le seul film de Toshio Matsumoto mais quelle œuvre ! Mélange subversif et cocktail inédit d’expérimentations en tout genre, Les Funérailles des roses imbrique avec une inventivité étonnante une réappropriation de la tragédie « Œdipe Roi » entrecoupée de séquences de distanciation (interviews, plans fixes, tournage…). L’ensemble s’inscrit dans la Nouvelle Vague japonaise, tourné en noir et blanc et mêlant allègrement drame, satire, humour parodique et plans gores sur fond de contre-culture, mélange des genres et ambiguïtés narratives. Le milieu évoqué est celui des travestis (« bara », rose, désignait à l’époque la communauté des homosexuels japonais) mais aussi des drogués et des rebelles en politique. Produit par ATG, Les Funérailles des roses est un de ces films hors norme qui identifient le brio d’un auteur et, avec cette œuvre, Toshio Matsumoto prouve toute l’ampleur de son expérimentation visuelle et intellectuelle (qui aurait dit-on inspiré Stanley Kubrick) dont les sources marquantes furent Jean Genêt, Jonas Mekas, Berthold Brecht, Sophocle ! Impossible de décrire ce spectacle bouillonnant, mise en abîme ahurissante, dont chaque plan est une surprise magnifiquement filmée par Tatsuo Susuki aux cadres sidérant d’esthétisme et qui suscite le décryptage (cf., bonus). Au centre de ce maelstrom faussement narratif aux inénarrables ruptures de ton et au symbolisme appuyé (exemple : affiches du film de Pasolini), un acteur/actrice remarquable, Pita (Shinnosuke Ikehata) à la sensualité troublante, dont la prestation en Eddie (c’était son premier rôle au cinéma) demeure incomparable. Loin du film crû et superficiel qui tiendrait du film underground à coloration trivialement « queer », Les Funérailles des roses est un film d’avant-garde nourri d’une dimension existentielle dissimulée par l’incroyable éclatement stylistique et par les distorsions esthétiques d’une mise en scène accomplie. Les Funérailles des roses est un film transgressif au décalage provocant qui ne laisse pas indifférent : son excellente restauration permettra de découvrir un film expérimental d’une extrême richesse et largement précurseur qu’il ne faudrait surtout pas manquer malgré la réalisme crû de certaines scènes.

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Commentaire technique

Image : copie HD, nouvelle restauration 4K, excellente définition avec du piqué étonnant dans les détails malgré une granulation argentique très fine, image très propre, gamme de gris nuancée, noirs denses

Son : mixage japonais monophonique clair et dynamique, sans résonnance ni distorsion