Actualités DVD « Georgia » : un très grand film injustement délaissé…

Note artistique : (4,5/5)

Synopsis

Aux États-Unis dans le début des années 60, trois amis, Danilo, David et Tom sont amoureux de la même femme, Georgia. Ils sont jeunes, étudiants, et l'avenir est plein de promesses. Dans les années qui suivent, ils vont, chacun de leur côté, connaître des joies, des drames, des désillusions, tandis que l'Amérique va vivre une incroyable décennie, entre Flower Power et guerre du Vietnam, libération des mœurs et mouvement des droits civiques, assassinat de Kennedy et la découverte des drogues dures.

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• Titre original : Four Friends
• Support testé : DVD
• Genre : comédie dramatique
• Année : 1981
• Réalisation : Arthur Penn
• Casting : Craig Wasson, Jodi Thelen, Michael Huddleston, Jim Metzler, Scott Hardt, Elizabeth Lawrence
• Durée : 1 h 50 mn 05
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 1,85/1
• Sous-titrage : français
• Pistes sonores : Dolby Digital 5.1 anglais, français
• Bonus : Georgia, une jeune américaine, interview de Antoine Sire, auteur de « Hollywood, la cité des femmes » (36 mn 18) - bande annonce originale (2 mn 09) - livret « Georgia ou la rencontre d’Arthur Penn et Steve Tesich » (12 pages) par Antoine Sire
• Éditeur : Rimini Editions

Commentaire artistique

Dernier grand film d’Arthur Penn, Georgia n’a pas laissé la même empreinte dans la mémoire des cinéphiles que Bonnie and Clyde (1967) ou Little Big Man (1970). Il est vrai que cette saga américaine narrant la destinée de quatre amis (titre original du film), une fille et trois garçons, ne possède pas les audaces des films antérieurs mais sa forme plus classique ne désavantage jamais son incroyable impact émotionnel. Le sujet du film est ambitieux puisqu’il prétend embrasser de son regard critique, bercé par la musique de Ray Charles, une assez longue période de l’histoire des États-Unis correspondant essentiellement au mandat présidentiel de John Kennedy : cette évocation passera par un prisme dramatique conventionnel, parler de la grande Histoire en s’intéressant à la petite, c'est-à-dire à travers les émois et la destinée de quatre adolescents devenus adultes. Cette construction, déjà vue ailleurs, gagne ici un atout majeur avec l’auteur du scénario, Steve Tesich, écrivain visionnaire, qui travailla en symbiose avec le cinéaste : de leur rencontre naitra Georgia, un film exceptionnel sur les années Kennedy qui aura su combiner la fascination du rêve américain, pétri de grands thèmes humanistes comme l’amour et l’amitié, et des évènements historiques majeurs, le mouvement hippie, l’émancipation des noirs, la guerre du Vietnam et la conquête de la lune ! Le découpage remarquable du film permet à Arthur Penn et à ses comédiens de raconter tout cela par le biais dramatique d’une histoire bouleversante fertile en péripéties, plus ou moins développées, et imprégnée d’émotions. Ce récit est d’ailleurs le noyau du scénario initial de Steve Tesich qu’il revendiquait comme autobiographique se remémorant son enfance dans une banlieue industrielle de Chicago. Le film aurait pu s’appeler Danilo, alter ego cinématographique de Tesich, tant ce personnage est central dans les enjeux et la narration de l’histoire même si celle-ci est fondamentalement basée sur les liens sentimentaux qui unissent les quatre amis d’enfance. Afin d’ancrer son film dans une évocation convaincante, le cinéaste confia la photographie au chef-opérateur de Raisnais et Bresson, Ghislain Cloquet, qui apporta l’expertise de sa vision réaliste au tournage presqu’entièrement effectué en décors naturels ; il décèdera hélas juste avant la sortie du film. C’est le même désir d’authenticité qui poussa Arthur Penn à éviter d’engager des acteurs renommés mais son choix décisif de comédiens inconnus se révèle parfait pour les deux rôles principaux. C’est Craig Wasson qui incarne très subtilement Danilo, sa fragilité, son idéalisme, ses indécisions, un personnage complexe aussi attendrissant qu’exaspérant tandis que Jodi Thelen, séduisante, sensuelle et spontanée, manifeste un tel abattage qu’elle monopolise l’attention et ravit la vedette dans toutes les scènes où elle apparaît. Le reste du casting n’est pas en reste et contribue à l’intensité de cette saga qui frise le chef-d’œuvre. Georgia se distingue par sa justesse de ton, entre nostalgie et registre sentimental (la relation de Danilo et son père par exemple) sans une touche de mélo, et la bienveillance accordée à ses protagonistes décrits, sans jugement, avec toute la complexité de leurs travers et de leurs mérites. Avec ce tableau générationnel, politique et critique de la société américaine sous l’ère Kennedy, Arthur Penn, à peine tempéré par son co-auteur Steve Tesich, affirmait magistralement son pessimisme sur la dérive du « rêve américain ». Une vision hélas toujours d’actualité. Film de conviction qui force l’admiration, Georgia est à voir absolument.

Commentaire technique

Copie SD tout à fait honorable avec une excellente définition pour le support, un grain modéré, très bon contraste, étalonnage adapté aux époques de l’histoire, colorimétrie chatoyante allant vers des teintes chaudes et des tons saturés, au fil du récit, pas de défaut notable ; mixage anglais 2.0 clair et dynamique, équilibré, sans distorsion ni souffle marqué ; VF nécessairement artificielle et bien moins dynamique