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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : anniversaire Fauré - La musique orchestrale

Intéressante idée de réunir quelques-unes des pages laissées par Fauré à l'orchestre ou orchestrées par lui. À la tête de l'Orchestre de chambre de Lausanne, Renaud Capuçon en livre une anthologie personnelle à laquelle il confère une belle unité de ton, retenu et délicat.

Gabriel Fauré a peu composé pour l'orchestre proprement dit. Son écriture orchestrale, qui se ressent du jeu du pianiste et de l’organiste qu'il était, reste toujours d'une grande sobriété. On pense à la Suite de Pelléas et Mélisande ou à Masques et Bergamasques. La première est un bijou de raffinement, ce que souligne la manière retenue dont l'aborde Renaud Capuçon. Conçue à partir d'une musique de scène pour la pièce de Maeterlinck, donnée en anglais à Londres en 1898, donc bien avant les travaux de Debussy pour son futur opéra, la suite qu'en tira Fauré et telle que créée en 1912, est constituée de quatre mouvements. Après une entame lente et intense, ''Prélude'' déploie une musique passionnée annonçant l'inévitable drame. ''Fileuse'' évoque la scène, non reprise par Debussy, où Mélisande file la laine en compagnie de Pelléas et d'Yniold, morceau empli d'une grande tendresse, mais où perce l'inéluctabilité de sa fin tragique. Page aérienne, dans son rythme balancé et sa délicate mélopée de flûte et de harpe, ''Sicilienne'' évoque l'insouciance des deux héros au bord de la fontaine. Enfin ''La mort de Mélisande'' est une marche funèbre d'une extrême gravité dont la péroraison est un sommet d'affliction. Bien différente, la Suite pour orchestre Masques et Bergamasques op.112 (1919) ressortit au genre du divertissement, inspiré des personnages de la Commedia dell'arte, où fleurit l'art de la demi-teinte si chère à l'auteur. Ses quatre parties font se succéder une ''Ouverture'' joyeuse et insouciante, un ''Menuet'' languissant façon pastiche, une '' Gavotte'' gaie et fort rythmée, enfin une ''Pastorale'' tout en douceur, mélancolique, parfait exemple du dernier style de Fauré.      

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Le Concerto pour violon en Ré mineur op.14, conçu en 1880, est resté inachevé au-delà du deuxième mouvement, lui-même détruit par le musicien, non satisfait du résultat. Seul demeure l'Allegro initial. Cette œuvre d'un jeune musicien, montre un beau mélodisme à l'appui d'un récit simple, non démonstratif qui, à l'occasion, sait exploiter une veine postromantique de par la sinuosité de la partie soliste, parfois logée dans le registre suraigu du violon. Il est à noter que Fauré reprendra les idées de ce morceau dans le premier mouvement de son tardif Quatuor (1924). 

Fauré a aussi orchestré des pièces conçues d'abord pour le domaine chambriste. Ainsi de la Berceuse op.16, à l'origine pour violon et piano, au parfum élégiaque si séduisant. De même l'orchestration apporte à la Ballade pour piano op.19 un supplément d'intensité, singulièrement dans les dernières pages. Écrite pour chœur et orchestre, la Pavane op.50 (1887) est donnée ici dans sa version pour orchestre seul de 1888. Elle possède la grâce d'un portrait empli de tendresse mélancolique, celui de la comtesse Greffulhe, alors protectrice du musicien. Ce que traduit sa subtile parure d'orchestre, dont des traits pénétrants de flûte. Enfin, Élégie op.24, d'abord écrite pour violoncelle et piano (1880), voit avec le soutien orchestral (1895), renforcer sa gravité et son discret pathétisme, sans diminuer son suprême raffinement mélodique. 

Il faut dire que les présents interprètes trouvent le juste ton, la vraie note secrète : Guillaume Bellom pianiste au jeu perlé, Julia Hagen, celliste engagée, et Renaud Capuçon usant de sonorités translucides. Sa direction possède la transparence qu'appellent ces œuvres, la retenue aussi et une indiscutable délicatesse du trait touchant à l'ineffable. Les musiciens de l'Orchestre de chambre de Lausanne le suivent dans cette approche qui ne cherche pas le brillant, mais cultive la quintessence poétique. Et la prise de son, au Théâtre de Beaulieu à Lausanne, achève de conférer à toutes ces pièces une tonalité chambriste, en parfaite adéquation avec la vision du violoniste-chef.
Texte de Jean-Pierre Robert  

Plus d’infos

  • Gabriel Fauré : Allegro du Concerto pour violon en Ré mineur op.14. Masques et Bergamasques op.112. Élégie op.24 (version pour cello & piano). Pelléas et Mélisande Suite op.80. Ballade op.19 (version pour piano et orchestre). Pavane op.50. Berceuse op.16 (version pour violon et orchestre)
  • Julia Hagen (violoncelle), Guillaume Bellom (piano)
  • Orchestre de chambre de Lausanne, violon & dir. Renaud Capuçon
  • 1 CD Deutsche Grammophon : 486 6250 (Distribution : Universal Music)
  • Durée du CD : 71 min 28 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orange (5/5)

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