Skip to main content
PUBLICITÉ
  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : les paysages choisis de la mélodie française orchestrée

Poursuivant l'exploration du répertoire de la mélodie française, Véronique Gens s'attache avec cet album aux œuvres orchestrées, injustement négligées. Grâce à la complicité d'Hervé Niquet, un chef qui sait combien ces musiques recèlent de trésors cachés, elle nous entraîne à la découverte de moult paysages choisis.

Initié par Berlioz, avec le cycle Les Nuits d'été, le répertoire de la mélodie avec orchestre a intéressé la plupart des compositeurs de la fin du XIXème siècle, de Massenet à Fauré, de Gounod à Saint-Saëns, mais aussi Dubois et Hahn. À cet exercice, tous se sont livrés avec adresse. C'est que le genre de la mélodie, où le détail est ciselé jusqu'à l'épure, peut tout aussi bien s’accommoder de l'habit symphonique, pour peu que le raffinement de l'instrumentation habite la rêverie musicale. De par leur richesse littéraire, les textes mis en musique, empruntés aux poètes de l'époque, les parnassiens et les symbolistes, ne sont pas amoindris, bien au contraire. Et lorsque la comparaison appert avec la version pour piano d'une pièce particulière, le résultat s'avère tout à fait probant. La parure orchestrale enrichit la miniature, la narration s'emplit de couleurs nouvelles, les thèmes traités, de l'amour, de la mort, de la nature, prennent une autre saveur. 

LA SUITE APRÈS LA PUB

Grâce aux recherches éditoriales du Palazzetto Bru Zane, le choix opéré par Véronique Gens et Hervé Niquet ouvre un large spectre et réveille quelques pépites. Chez les compositeurs en vue, bien sûr. Fauré d'abord, dont ''Clair de lune'' trouve un autre atour dans son orchestration discrète, comme il en va de ''Les roses d'Ispahan'', là où le violoncelle enlaçant la voix ajoute à la fameuse modulation fauréenne. Mais aussi Gounod dont ''La fauvette'' fait penser à un air de Manon. De la trentaine de mélodies avec orchestre de Saint-Saëns, on entend ''La Splendeur vide'', extraite des Mélodies persanes op.26, oscillant entre climat merveilleux et écriture généreuse. Et ''Aimons-nous'' (de Banville) livre un paysage mélancolique. Fameux mélodiste, Reynaldo Hahn est représenté par ''D'une prison'' (Verlaine), immortalisé par ce distique final « Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà, de ta jeunesse ? », ou par ''Paysage'' (André Theuriet), où s'exprime la délicatesse de la passion amoureuse. Théodore Dubois, un musicien qui sort peu à peu de son purgatoire, se voit offrir plusieurs pièces, dont deux extraites des Chansons de Marjolie, à la séduisante orchestration : ''Celui que j'aime'' et son léger souffle épique, et ''En paradis'', paré de solos de violon et de violoncelle.  

C'est peu dire que Véronique Gens est ici chez elle. Qui d'autre que cette magnifique artiste peut mieux restituer le dire vrai de ces mélodies. L'art de la diseuse trouve là de nouvelles occasions de magnifier la langue de Verlaine, de Gautier ou de Sully Prudhomme. Les mille inflexions du soprano ont loisir de se déployer dans le tragique contenu ou la joie discrète, de cultiver le sous-entendu délicat. Elle bénéficie du précieux soutien que prodigue Hervé Niquet, à la tête de son orchestre munichois avec lequel il a déjà réalisé divers projets de musique française, et ici magnifié par une prise de son, au Studio 1 de la Radio Bavaroise, de fine qualité. 

Le récital s'enrichit d'ailleurs de quelques morceaux instrumentaux, entrelaçant les mélodies, « comme autant d'échos muets aux poèmes déclamés », souligne joliment Alexandre Dratwicki. On en jugera par deux Andantinos extraits des Petits rêves d'enfant de Dubois, l'un de sa douce mélodie berçante, l'autre marqué grazioso, plus joyeux. Mais aussi avec ''Nocturne'' tiré de la suite Shylock op.57 de Fauré, comme une évocation de quelque douleur enfouie. Quelques pièces de Massenet trouvent encore à prolonger les atmosphères installées par les pièces chantées : ''Invocation'', tiré de Les Érinnyes, et son solo de violoncelle, ''Pastorale'', extrait d'Esclarmonde, un opéra naguère tiré de l'oubli par Joan Sutherland, et ''Solitude'' de Sapho, emportant quelque angoisse.
Texte de Jean-Pierre Robert 

Plus d’infos

  • ''Paysage''
  • Mélodies pour soprano et orchestre de Théodore Dubois, Reynaldo Hahn, Gabriel Fauré, Camille Saint-Saëns, Jules Massenet, Ernest Chausson, Charles Gounod
  • Pièces orchestrales de Théodore Dubois, Jules Massenet, Fernand de La Tombelle, Gabriel Fauré
  • Véronique Gens, soprano
  • Münchner Rundfunkorchester, dir. Hervé Niquet
  • 1 CD Alpha : Alpha 1030 (Distribution : Outhere Music) en coproduction avec le Palazzetto Bru Zane
  • Durée du CD : 56 min 22 s
  • Note technique : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleue (5/5)

CD disponible sur Amazon

- ACHETER LE CD

LA SUITE APRÈS LA PUB


Autres articles sur ON-mag ou le Web pouvant vous intéresser


Gabriel Fauré, Reynaldo Hahn, Charles Gounod, Véronique Gens, Ernest Chausson, Jules Massenet, Münchner Rundfunkorchester, Hervé Niquet, Camille Saint-Saëns, Théodore Dubois, Fernand de La Tombelle

PUBLICITÉ