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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Nikita Mndoyants joue les Sonates Nos 4 & 8 de Prokofiev

En associant la Quatrième sonate et la Huitième, le pianiste russe Nikita Mndoyants met l'accent sur deux pôles de l'œuvre de Serge Prokofiev : l'audace de la première manière et la suprême maîtrise de la maturité. Dans des exécutions de haute tenue de la part de ce jeune et talentueux interprète lauréat de plusieurs concours internationaux et par ailleurs compositeur.

La Sonate N°4 pour piano op.29 en Ut mineur, composée en 1917, avant la révolution d'Octobre, est conçue à partir de pièces antérieures, notamment un projet de symphonie ébauché en 1908. D'où son sous-titre ''d'après des vieux cahiers''. Elle offre une tonalité sombre, car écrite à la mémoire d'un ami musicien qui s'était suicidé. Mais elle « se rapproche de l'allégorie et du conte de fée », dans la tradition russe d'un Rimski-Korsakov, remarque Nikita Mndoyants. Ainsi son premier mouvement installe-t-il une ambiance mystérieuse où est sollicité le registre grave du piano. L'Andante médian débute par un thème presque lugubre, également logé dans le grave, qui va être travaillé en diverses variations. Le finale Allegro con brio ma non leggiere, de forme rondo, est de facture plus animée, d'où émerge une mélodie sautillante se développant dans le registre aigu. La coda fait assaut de traits balayant l'entier clavier. Mndoyants, qui souligne « la clarté cristalline de la logique de Prokofiev », livre du discours serré de cette étonnante sonate une lecture très construite et fait sien tout ce qu'il y a ici d'inattendu et d'arrière-plans austères.

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Toute autre est la Sonate N°8 op.84 en Si bémol majeur. Troisième et dernière des sonates dites ''de guerre'', elle a été créée en 1944 à Moscou par Emil Gilels. Sviatoslav Richter en fera un de ses chevaux de bataille, y voyant « la plus riche de toutes les sonates de Prokofiev », en raison de sa « vie intérieure complexe ». Prokofiev dira de l’œuvre que « son caractère sera avant tout lyrique ». Sans doute, à l'image de l'Andante dolce initial, très chantant et apaisé. Mais en apparence, car de subits changements de tempo et d'atmosphère avec traits percussifs et obstinés vont en rompre le bel ordonnancement. Ainsi en est-il durant l'épisode évoquant une sorte de danse primitive et flattant la résonance grave du piano par un effet grotesque, et à la coda brillante, sorte de déferlement tempétueux. L'Andante sognando médian, inspiré du menuet d'une musique de scène pour ''Eugène Onéguine'', non menée à terme, est lui aussi extrêmement chantant, presque suave dans ses modulations confiées au registre pianissimo. Le finale Vivace renoue avec la manière motorique au long de plusieurs phases contrastées : ben marcato, ostinato, andantino et retour au premier thème. La palette est large avec chevauchements de rythmes et tout finit dans quelque transe. Comme pour la précédente sonate, Nikita Mndoyants possède la mesure de cette pièce immense, exigeante, pas seulement en termes de technique digitale, mais surtout de maîtrise des idées qu'elle véhicule.

Le programme comprend encore une habile transcription par Mndoyants lui-même du Scherzo de la Symphonie N°5, qui en restitue bien l'esprit dans l'agencement de ses diverses séquences et de ses modes d'écriture, dont une forme de martèlement typique chez Prokofiev et un bel épisode lyrique en guise de trio. Enfin le pianiste offre une de ses propres compositions pour piano : Nocturne, musique évocatrice, qu'il dit s'inspirer du minimalisme américain et même de Chopin. On est séduit par l'usage de la résonance du piano à travers une succession d'accords comme suspendus, car entrecoupés de silence. Un sentiment de mystère s'en dégage avant que le débit ne s'anime, pour finir comme sur une interrogation.

La prise de son ménage un beau relief sur le Steinway saisi de près et nanti de graves impressionnants.
Texte de Jean-Pierre Robert

Plus d’infos

  • Serge Prokofiev : Sonates pour piano N°4 op.29 & N°8 op.84. Scherzo ext. de la Symphonie N°5 (transcription de Nikita Mndoyants)
  • Nikita Mndoyants : Nocturne
  • Nikita Mndoyants, piano
  • 1 CD Aparté : AP 339 (Distribution : [Integral])
  • Durée du CD : 64 min
  • Note technique : etoile verteetoile verteetoile verteetoile verteetoile verte (5/5)

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