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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : histoires de chants, de danses et d'amours chez Monteverdi

MonteverdiDaylight

Le nouveau projet montéverdien de Rinaldo Alessandrini se concentre sur le thème du triomphe de l'Amour au sortir de la nuit, lorsque revivifié par la lumière du jour. Ce qui s'analyse sur le papier en une sorte de best of des Livres de madrigaux et d'arias tirées des opéras, nous emmène bien au-delà d'un catalogue : dans une représentation théâtrale imaginaire.

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Faisant suite à un précédent album consacré à la nuit amoureuse, le chef italien a concocté un programme qui en poursuit les délices, pour acheminer les protagonistes vers la lumière du jour, depuis l'aube naissante jusqu'au plein soleil. « Je m'inclus parmi les amoureux de l'idéal montéverdien où tout est théâtre », à travers « le pouvoir curatif du chant et l'énergique exaltation de la danse », affirme-t-il. Pour ce faire, il a imaginé une dramaturgie porteuse d'images, partagée en diverses séquences enchaînées, qu'il peuple d'extraits d’œuvres du musicien : une sorte de scène idéale, lieu des émotions, des plus délicates aux plus extrêmes. Sans s'enfermer dans le carcan de l'ordre chronologique, il offre un florilège de pièces depuis les débuts polyphoniques jusqu'aux opéras. Où l'on retrouve une des caractéristiques essentielles de la manière de Monteverdi, le sens des contrastes entre pièces, qui confine à un jeu d’oppositions souvent marquées. Comme un autre élément tout aussi essentiel, celui de la primauté du texte auquel est toujours soumis la musique, une des préoccupations majeures de Monteverdi à travers toutes ses compositions vocales. Sont ajoutées des pièces instrumentales empruntées à deux contemporains Biagio Marini et Andrea Falconieri, selon une pratique courante à l'époque, consistant à truffer le chant de morceaux vifs comme la gaillarde ou la chaconne.

Les passions amoureuses et leur lot d'effets plus ou moins paroxystiques, voire extravagants, partagées entre chant et danse, on va les suivre depuis le prélude d'Orfeo jusqu'à un madrigal à cinq voix extrait des Madrigali guerrieri ed amorosi. En passant par plusieurs pièces jalonnant l'entière production de Monteverdi, tirées d’œuvres cardinales écrites entre 1584 et 1651, comme les Livres de madrigaux, les Scherzi musicali et les opéras Il ritorno di Ulisse in patria ou L'incoronazione di Poppea. Juxtaposant sans crier gare des morceaux des débuts, comme la délicieuse Canzonetta a tre voci de 1584 ''Sù, sù, sù ch'el giorno è fore'' (Allons, allons, le jour est né) et d'autres appartenant aux dernières inspirations, telle ''Alle danze, alle gioie'' (Aux danses, aux joies) du Neuvième Livre de madrigaux de 1651. Particulièrement signifiant dans le cadre du présent concept, le duo entre Melanto et Eumaco, tiré du Retour d'Ulysse, conte la prégnance de la folie amoureuse. Comme encore l'échange vif-amer entre le page Valletto et sa conquête Damigella du Couronnement de Poppée, où ces deux personnages plébéiens n'ont rien à cacher de leurs excès dans une joute libidineuse à se pâmer.

Dépassant l'aspect patchwork, on tient là une œuvre sui generis, sorte de théâtre imaginaire, qui emporte l'adhésion eu égard la pertinence des enchaînements et au naturel des transitions, laissant apprécier la constance du style montéverdien à travers ses évolutions et sa réelle séduction sonore. L'artisan en est bien sûr Rinaldo Alessandrini, un maître incontesté de cet idiome. Qui sait trouver le ton juste dans les danses, leur caractère badin ou effréné, et faire ressortir les traits souvent hyperboliques des chants où l'excès est un paramètre naturel pour exprimer l'exacerbation des passions amoureuses. Son Concerto italiano, fort d'une douzaine de musiciens, distille des sonorités envoûtantes. Les solistes vocaux sont à l'unisson : les ténors Valerio Contaldo et Raffaele Giordani, d'un grain différent, le premier altier, le second plus doux, les sopranos, Monica Piccinini et Sonia Tedla, ou la basse Salvo Vitale. Tous prêtent leur art consommé à ces joutes joyeuses ou mélancoliques. 

L'équilibre entres les voix et le ripieno est excellent, tous captés dans une atmosphère généreuse ménageant les écarts dynamiques privilégiés par le chef.

Texte de Jean-Pierre Robert  

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Plus d’infos

  • ''Daylight : stories of songs, danses and loves''
  • Claudio Monteverdi : extraits d’Orfeo. Il ritornio di Ulisse in patria. L'incoronazione di Poppea. Secondo, Quarto, Settimo, Nono Libri de'madrigali. Madrigali guerrieri ed amorosi. Canzonetta venezia. Scherzi musicali. Il primo libro di canzone
  • Biagio Marini : Gagliarda seconda. Corente nona
  • Andrea Falconieri : Ciaccona - L'eroica
  • Monica Piccinini, Sonia Tedla (sopranos), Andres Montilla (alto), Valerio Contaldo, Raffaele Giordani (ténors), Salvo Vitale (basse)
  • Concerto italiano, dir. Rinaldo Alessandrini
  • 1 CD Naïve : OP 7366 (Distribution : Believe Group)
  • Durée du CD : 61 min 47 s
  • Note technique : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rouge (5/5)

CD et MP3 disponibles sur Amazon 



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Raffaele Giordani, Salvo Vitale, Andrea Falconieri, Rinaldo Alessandrini, Concerto Italiano, Valerio Contaldo, Claudio Monteverdi, Biagio Marini, Monica Piccinini, Sonia Tedla, Andres Montilla

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