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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : une tétralogie incandescente de sonates pour violon

Incandescence

  • ''Incandescence''
  • Ottorino Respighi : Sonate pour violon et piano en Si mineur
  • Ernő von Dohnányi : Sonate pour violon et piano en Ut dièse mineur op.21
  • Karol Szymanowski : Romance pour violon en Ré majeur op.23
  • Johannes Brahms : Sonate pour violon et piano N°3 en Ré mineur op.108
  • Stéphanie Moraly (violon), Romain David (piano)
  • CD Aparté : AP 250 (Distribution : [PIAS])
  • Durée du CD : 72 min
  • Note technique : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rouge (5/5)

À partir de la troisième sonate pour violon de Brahms, le duo Moraly-David nous invite à l'écoute de trois œuvres injustement négligées, écrites durant la période des années 1910-1917, de Respighi, von Dohnányi et Szymanowski. Toutes vibrant d'une flamme intérieure et empreintes de lyrisme post-romantique. Ceci ajouté à une complexité instrumentale tenant de la gageure, que la sincérité comme la justesse de l'interprétation appréhendent avec aisance.

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Ottorino Respighi écrit sa Sonate pour violon et piano en Si mineur en 1917, peu après le poème symphonique Fontaines de Rome. Immédiatement séduisante, cette musique est « une sorte de jaillissement », remarque Stéphanie Moraly. La partie de piano est très exigeante, presque orchestrale, et celle de violon montre les talents de coloriste du compositeur italien, qui se souvient de Rimski-Korsakov. Le Moderato initial s'étire comme un feu qui se consume, gorgé de lyrisme éperdu et en même temps très raffiné. L'Andante espressivo s'ouvre sur une longue introduction pianistique d'où émerge le violon. Le discours aux contours rhapsodiques, sa grande montée en puissance et sa retombée élégiaque bénéficient de la chaleureuse sonorité de la violoniste. Mouvement sans doute le plus original, la Passacaglia finale, Allegro moderato ma energico, est pourvue des traits « démentiels » au piano, selon Romain David. Les deux partenaires investissent avec brio cette suite de variations sur une basse obstinée conduisant, après un épisode plus lyrique, à une conclusion glorieuse sur un accord tonitruant au clavier. La Romance pour violon op.23 de Karol Szymanowski date de 1910 et est dédiée au virtuose Paul Kochanski. C'est une bouffée de lyrisme, d'une large ligne mélodique, évocatrice de Chopin. Une longue méditation aussi, entièrement tonale, mettant en valeur le violon jusqu'au suraigu filé final, et là encore magistralement écrite.

Le compositeur, pianiste et chef d'orchestre Ernő von Dohnányi (1877-1960) a conçu un corpus de musique de chambre substantiel. Ne compose-t-il pas à 18 ans son 1er Quintette pour cordes suivant le modèle de ceux de Brahms. L'influence du grand maître allemand est aussi perceptible dans la Sonate pour violon en Ut dièse mineur op.21 (1912), là encore un bel exemple de post-romantisme. En trois parties enchaînées, l’œuvre ne comprend pas de mouvement lent. L'Allegro appassionato captive par son inspiration thématique et sa tonicité. L'Allegro suivant, qui porte la curieuse indication ''ma non tenerezza'' (mais sans tendresse) est construit sur le schéma de thème d'un fervent lyrisme et de variations originales dont certaines non exemptes d'humour. Un Vivace assai conclut de manière plus expansive et dans un grand naturel expressif par un retour du premier thème de l’Allegro initial, cette fois dans un ton plus mélancolique.

On entend en fin de programme l’œuvre à partir de laquelle celui-ci a été conçu : la Sonate N°3 pour violon en Ré mineur op.108 de Brahms. La plus audacieuse sans doute, là où « tout y est agitation », dit encore Stéphanie Moraly. Son inspiration est pourtant essentiellement mélodique. Leur duo en donne une exécution sensible et d'un grand naturel, témoin d'une vraie complicité. L'Allegro est fluide, combinant habilement ses divers thèmes, dont le second alla ungarese. L'Adagio est pris très lent et expressif, notamment pour ce qui est du deuxième thème culminant dans ses traits arpégés, une des grandes inspirations rêveuses de Brahms. L’Un poco presto e con sentimento, sorte d'intermezzo, est ménagé avec aisance et doigté quant aux contrastes rythmiques entre ses divers épisodes. Enfin, le Presto agitato, là aussi tout de jaillissement thématique, s'avère plein de feu, sans pour autant céder à la tentation de la vitesse. Il s'agit plutôt de « fulgurance », selon la belle formule de Romain David. 

La prise de son, à la Salle Colonne à Paris, pourvoit à un juste équilibre des deux voix, l'une et l'autre bien centrées, et à une extrême présence.

Texte de Jean-Pierre Robert   

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