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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : le gamin de Paris en musique

Paris Vagabond

  • ''Paris vagabond''
  • Joseph Kosma : choix de mélodies
  • Francis Poulenc : Banalités. Cinq poèmes de Paul Eluard
  • Reynaldo Hahn : deux mélodies
  • Albert Roussel : Jazz dans la nuit
  • Déodat de Séverac : Le ciel par-dessus le toit
  • Fabien Hyon (ténor), Juliette Sabbah (piano)
  • 1 CD Passavant Music : PAS 120281 (Distribution : Socadisc)
  • Durée du CD : 60 min 32 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile grise (4/5)

Pour son premier CD, le ténor Fabien Hyon joue l'originalité et le fait en chansons. Pour conter les tribulations d'un gamin de Paris, ses émerveillements, ses fantasmes, à la découverte des choses de la vie dans la grande ville. De Prévert à Apollinaire, de Poulenc à Kosma, voilà un programme bien senti, interprété par un artiste qui sait où il va et une pianiste qui a bien à dire.

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Le gavroche de Hugo a été mis en musique par les compositeurs du XXème siècle qui ont puisé naturellement à la poétique ironique d'écrivains engagés. L'association d'un Joseph Kosma et de Jacques Prévert, d'un Francis Poulenc et de Paul Eluard a enfanté des œuvres mémorables puissamment évocatrices dans leur concision. Pour illustrer ces mots empruntés au recueil Les Misérables : « ce petit être est joyeux... il court, guette, quête, perd son temps, ...jure comme un damné, hante les cabarets, connaît des voleurs, tutoie des filles, parle argot, chante des chansons obscènes, et n'a rien de mauvais dans le cœur ». Joseph Kosma et Jacques Prévert en débusquent les diverses aventures soit avec un humour grinçant (''Le cancre''), soit dans une sympathique toquade (''Chasse à l'enfant'', ''A la belle étoile''). Mais encore faisant sienne une philosophie résolument définitive : « Je n'en fais qu'à ma tête », distillée dans ''Compagnons des mauvais jours''. La musique piquante de Kosma s'adosse à la perfection aux textes miniaturisés de Prévert, là où le romanesque habite les mésaventures du gosse des rues avec un humour léger. « Il faut essayer d'être heureux, ne serait-ce que pour donner l'exemple », proclame par ailleurs le poète. Réconfortante morale !

Francis Poulenc use de sa face ''voyou'' pour brosser des tableaux presque aphoristiques basés sur les poèmes on ne peut plus évocateurs de Guillaume Apollinaire ou de Paul Eluard. Du premier, les cinq mélodies réunies en 1940 sous le titre de Banalités sont proches de la chanson. « Lorsqu'il s'agit de Paris j'y vais souvent de ma larme ou de ma note », dit-il à propos de ''Voyage à Paris'', l'avant-dernière mélodie du recueil. Sur un rythme de valse parigote, on s'amourache de « Paris joli !». Savoureux aussi, le langoureux ''Hôtel'', pris ici dans un tempo très lent, accentuant le sentiment d'abandon paresseux. Admirable de force, l'ultime pièce ''Sanglots'' recèle des harmonies annonciatrices des Dialogues des Carmélites. Comme quoi le côté ''moine'' de Poulenc n'est pas loin. D'Eluard, quelques années plus tôt, en 1931, il avait mis en musique Cinq poèmes. Un cycle dont les deux dernières pièces ont à voir avec la thématique parisienne (''Rôdeuse au front de verre'' et ''Amoureuses''), où il est question « des yeux à casser les cailloux ». Le pianisme oscille entre véhémence et accompagnement sage, mais d'une veine déjà bien particulière au musicien. 

Le programme convoque encore trois autres musiciens. L’immanquable Reynaldo Hahn, avec ''Le marchand de marrons'', où le gamin en hiver chaparde lesdits marrons dans les étals des Grands Boulevards, et ''Encore sur le pavé'', un nocturne ouaté qui se conclut sur un évanescent pianissimo sur le fil de la voix. Puis Albert Roussel et ''Jazz dans la nuit'' qui comporte une intéressante partie pianistique sur un rythme chaloupé. Enfin Déodat de Séverac (1872-1921) dont la mélodie ''Le ciel est par-dessus le toit'', sur un texte de Verlaine, est proche du conte philosophique et nostalgique sur cette interrogation essentielle « Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà, de ta jeunesse ? ».

De son timbre ensoleillé de ténor lyrique, Fabien Hyon apporte à ces pièces une verve bien sentie et des teintes raffinées. L'excellence de la diction est au service d'un évident souci du mot. Rien d'étonnant chez un artiste qui formé au CNSMDP, s'est perfectionné auprès de José van Dam à la Chapelle Musicale Reine Elisabeth. Le piano pareillement habité de Juliette Sabbah les enlumine grandement. Dommage que l'absence des textes dans le livret ne permette pas d'en savourer plus les détails.

Ils sont enregistrés selon une technologie dite ''Home Concert'' au studio de Passavant, mais dans une acoustique plutôt sèche qui ne favorise pas le registre forte du chanteur. Si l'équilibre piano-voix est satisfaisant, celle-ci apparaît curieusement souvent très à droite du spectre sonore.

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Texte de Jean-Pierre Robert

CD disponible sur Amazon 



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Reynaldo Hahn, Francis Poulenc, Fabien Hyon, Juliette Sabbah, Joseph Kosma, Albert Roussel, Déodat de Séverac

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