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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Alexander Paley joue Rachmaninov

Rachmnanivo Alexandre Paley

  • Serge Rachmaninov : Prélude op.3 N°2. 10 Préludes op.23. Études-Tableaux op.33
  • Alexander Paley, piano
  • 1 CD La musica : LMU 024 (Distribution : PIAS)
  • Durée du CD : 70 min 51 s 
  • Note technique : etoile verteetoile verteetoile verteetoile verteetoile verte (5/5)

Le pianiste d'origine moldave Alexander Paley revient à un de ses compositeurs de prédilection, Rachmaninov, dont il donne les Préludes op.23 et les Études-Tableaux de l'op.33, deux œuvres qui témoignent tout autant de paysages de l'âme slave. Et dans des interprétations où la virtuosité ne le cède en rien à la profondeur du geste.

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Serge Rachmaninov a confié au piano ses plus belles inspirations, à l'instrument solo plus encore que dans ses illustres concertos. La formidable virtuosité que recèlent ces partitions ne doit pas cacher la recherche d'expressivité. Et les modes techniques originaux qu'elles déploient, occulter une veine post-romantique, plaçant le musicien au rang des grands contributeurs du répertoire pianistique du début du XXème siècle. On ne saurait voir dans ses pièces brèves des morceaux visant uniquement l'effet. Les interprètes actuels l'ont bien compris, qui s'attachent à transcender une virtuosité par trop évidente. Tel est l'art du moldave et américain Alexander Paley dont l'indéniable poigne, l'incroyable facilité digitale savent s'effacer devant la recherche de la couleur et de l'expressivité sous-jacente. L'exécution des 10 Préludes op.23 en est la meilleure démonstration. Écrites en 1903, dans une période enfin heureuse pour le compositeur, cet ensemble, conçu comme un hommage à Chopin, se signale par une belle habileté formelle au service d'une invention thématique presque sans limite, jusqu'à la fantaisie. On y trouve d'abord l'épanchement de l'âme slave et sa nostalgie consubstantielle, comme dans l’étude N°1 Largo, dont Sviatoslav Richter dira « on y ressent la fraîcheur d'une soirée russe au bord d'un étang d'où s'élève le brouillard », et dans la dernière, également marquée Largo, qui retrouve une même atmosphère presque crépusculaire, et cette fois sage dans son expression pianistique. Ailleurs, on admire la beauté du chant (N°4), et le lyrisme discret de la 6ème se déroulant comme une improvisation et dans la nuance pianissimo. Mais aussi l'Héroïsme avec la 2ème, ses larges accords résonnants dans le grave et ses coulées d'arpèges, le tout plus que grandiose, ou dans la N°5, sur un rythme de marche d'une scansion si particulière et qui s'orne d'un intermède central lyrique. On rencontre bien sûr la brillance, comme à la 7ème généreusement arpégée et ses grands accords de la main gauche, mais réalisant un étonnant équilibre entre registres aigu et grave, ou à la 8ème, Allegro vivace, qui poursuit la quête de la précédente dans une fluidité presque impressionniste. L'étude N°9 offre un pseudo mouvement perpétuel.

Les Études-Tableaux op.33, de 1911, sont bien différentes. Le romantisme s'éloigne à la faveur d'un langage harmonique plus audacieux et d'un renforcement de la composante rythmique avec des ruptures inattendues qui rapprochent Rachmaninov de Prokofiev et de Stravinsky. On a disserté sur l’appellation d'« Étude -Tableaux », pour dire de manière un peu courte qu'il s'agissait d'études de tableaux. Mais ce qui vaudra pour le second recueil de l'op.39 l'est peu s'agissant de l'op.33 dont les pièces sont proches de préludes. Alexander Paley joue les six pièces (sur huit) que l'auteur a souhaité publier, les Nos3 & 4 ayant été retirées. La première hésite entre martial et grotesque. La 2ème est lyrique de son ondoiement mélodique à la main droite. La 5ème, ''Non allegro – Presto'' déploie une course vertigineuse de la main droite et des sauts d'octaves audacieux. Allegro con fuoco, la N°6 évoque quelque fête avec fanfares par une écriture chargée et en déhanchement qui peut faire penser à Petrouchka. Toute en contraste, la 7ème se distingue par son économie de moyens. Le chant y est partagé entre les deux mains et comporte une sorte de cadence au médian. La 8ème ''Grave'' reste la plus dramatique de la série, offrant rythme pointé déclamatoire, effets carillonnants très percussifs, volées d'arpèges de la main gauche.

La formidable maîtrise digitale d'Alexander Paley, nantie d'un usage efficace de la pédale, autorise un large nuancier dynamique, qui évite cependant toute dureté. Ce que la prise de son, à l’Église Protestante luthérienne de Bon-Secours à Paris, magnifie par une ambiance généreusement résonnante. Et la palette de couleurs rend à Rachmaninov toutes ses vertus de mélodiste.

Texte de Jean-Pierre Robert      

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