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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Philippe Jaroussky interprète l'oratorio italien

PhilippeJaroussky LaVanitaDelMondo

  • ''La Vanità del mondo''
  • Airs extraits d'oratorios italiens de Pietro Torri (Abramo, La Vanità del mondo), Alessandro Scarlatti (La Giuditta ), Fortunio Chelleri (Dio sul Sinai), George Frideric Handel (Il Trionfo del Tempo e del Disinganno), Antonio Caldara (Assalone, Santa ferma, Morte e sepoltura di Christo), Antonio Maria Bononcini (La decollazione di San Giovanni Batista), Nicola Fago (Il Faraone sommerso), Johann Adolph Hasse (La conversione di Sant'Agostino), Benedetto Marcello (La Giuditta)
  • Philippe Jaroussky, contre-ténor & direction
  • Avec Yannis François, baryton-basse
  • Ensemble Artaserse
  • 1 CD Erato : 0190295179298 (Distribution : Warner Classics)
  • Durée du CD : 73 min 10 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orange (5/5)

Cherchant toujours et toujours à approfondir et élargir son répertoire, Philippe Jaroussky se tourne vers l'oratorio italien. Qui fleurit à la fin du XVIIème et durant la première moitié du XVIIIème siècle sous la plume de nombreux compositeurs, pas seulement italiens, qui mirent en musique les grandes histoires sacrées tirées de l'Ancien Testament. Cette riche écriture vocale, le contre-ténor, qui dirige son ensemble Artaserse, la met en valeur par le style accompli qu'on lui connaît. Le CD dévoile aussi plusieurs premières mondiales au disque.

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Le genre de l'oratorio italien fleurit à Rome dès le milieu du XVIIème, où pour des raisons d'ordre religieux, il est prohibé de représenter l'opéra. Il est vite connu aussi à Florence, à Venise et à Naples. C'est une mine, où bien des éminents chanteurs actuels, comme Cecilia Bartoli, aiment à se plonger. Philippe Jaroussky s'y livre à son tour avec délices. On pense bien sûr à Haendel et ses années romaines. Son Il Trionfo del Tempo e del Disinganno connaît immédiatement le succès. L'aria ''Lascia la spina'', chantée par Piacere (Le Plaisir), en lutte avec la Beauté et la Désillusion, est d'une telle séduction qu'il en est devenu un tube. Le contre-ténor en fait un petit joyau à force de simplicité mais aussi de sincérité, dans un tempo lancinant à la première partie et au da capo. Alessandro Scarlatti est connu pour avoir beaucoup écrit pour ce genre musical. L'oratorio La Giuditta traite un thème cher aux artistes de l'époque. Le récitatif et l'aria ''Dormi, o fulmine di guerra'', chanté par la nourrice, tandis que Judith s'apprête à porter le coup fatal à Holopherne, est original en ce que sa douce mélopée aux cordes graves contraste avec le poids des mots, eux-mêmes délivrés pianissimo en des vocalises envoûtantes, s'amenuisant jusqu'au silence. On notera au passage que Jaroussky s'apprête à chanter et à diriger un autre oratorio de Scarlatti, Il primo Omicidio, à Salzbourg en 2021. Sur le même sujet et le même titre de La Giuditta, Benedetto Marcello a, entre autres, composé un oratorio dont est donnée ici une aria vive et hyper brillante flattant le registre aigu.

Le vénitien Antonio Caldara a servi l'oratorio avec près de 40 titres. Il est représenté ici par trois arias. De Santa Ferma (1713/17), le récitatif et l'aria ''Amar senza penar'' (Aimer sans souffrir) est de veine doloriste et de style préclassique. Celle tirée d'Assallone (ca. 1720), de type ''di furore'', exprime toute la véhémence d'une chasse contre l'impie. En revanche, ''È morto il mio Gesù'', extrait de Morte e sepoltura di Christo exhale une plainte dramatique de ton presque opératique, dans la manière cultivée alors à la cour des Habsbourg à Vienne où le musicien exerçait des fonctions officielles. Antonio Maria Bononcini donne à Vienne en 1707 La decollazione di San Giovanni Battista dont l'aria ''Bacio l'ombre e le catene'' (Je baise l'obscurité et les chaînes) est un exemple d' ''air d'ombre'', de tonalité sombre où la voix dialogue avec le ripieno, et qui est prolongée par une sinfonia.

On découvre des morceaux dus à Pietro Torri, dont le superbe ''Esiliatevi pene funeste'' (Exilez-vous peines funestes), tiré de La Vanità del Mondo (1706), aria enjouée et rythmée avec vocalises tendues et hautbois solo, sur le sujet de la vanité des richesses, comme dans l'oratorio précité de Haendel. Celle tirée de l'oratorio Abramo (1731) offre un récit dramatique avec violon solo entourant la voix dans ses douces vocalises dans le medium. Il faut encore compter avec Hasse, témoin de la propagation hors d'Italie de ce genre prolixe. Le récitatif accompagné et l'aria ''Il rimorso opprime il seno'' (Le remords m'oppresse tant), extraits de La Conversione di Sant'Agostino (1750) offre d'abord un monologue où, s'adressant à Dieu, Augustin exprime son trouble quant à sa conversion et, le doute passé, le bonheur entrevu. L'aria reprend ces états de l'âme dans un langage haletant au ripieno et un chant très ornementé.

Dans ce répertoire nouveau pour lui au disque, Jaroussky déploie un art du chant tout aussi consommé que dans ceux qu'il a jusqu'à maintenant abordés. On admire particulièrement les longues phrases tenues dans le medium de la voix et comme il en assure les fins dans la plus grande douceur. Ses talents d'acteur, et donc de diseur, éclatent dans les récitatifs, d'une vraie rectitude de ton. Sa direction d'orchestre est experte, mesurée, tirant de son ensemble Artaserse un raffinement qui sait se parer d'accents lyriques intenses ou fièrement dramatiques. Ne serait-ce que dans les interventions de solo de violon de Julien Chauvin, également cette fois leader de la formation, et de hautbois solo de Guillaume Cuiller.

L'enregistrement au RIFFX Studio I de La Seine Musicale début juin 2020, a été vécu ''comme une libération'' après la période du confinement, souligne Philippe Jaroussky. La prise de son, due à l'équipe Lanceron, Collard, Pierre, offre une image large et séduisante dans une acoustique ouverte saisissant toutes les harmoniques de la voix. Celle-ci est saisie dans un rapport parfaitement équilibré avec l'ensemble orchestral.

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Texte de Jean-Pierre Robert 

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