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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Des tableaux d'enfance pour jeunes et adultes pianistes

Tableaux D enfance Tristan Pfaff

  • ''Tableaux d'enfance''
  • Dimitri Kabalevski : Trente pièces pour enfants, op.27. Cinq variations faciles, op.51
  • Aram Khatchaturian : Tableaux de l'enfance. Dix pièces pour jeune pianiste
  • Tristan Pfaff, piano
  • 1 CD Ad Vitam records : AV 191215 (Distribution : PIAS) www.advitam-records.com
  • Durée du CD : 71 min 41 s
  • Note technique : etoile verteetoile verteetoile verteetoile verteetoile grise (4/5)

Le monde de l'enfance a toujours fasciné les musiciens russes, singulièrement dans leur musique pour piano. Jusqu'à la génération du XXème siècle, qui a modelé l'héritage des aînés dans le moule de la culture soviétique. Ainsi de Kabalevski et de Khatchaturian. Tristan Pfaff les réunit sur ce thème pour un bouquet de pièces pas si faciles, plus destinées aux doigts des adultes qu'à ceux de leurs doués rejetons. Un programme fort imaginatif, hors de sentiers fréquentés.

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Si le genre de la musique associée au monde de la jeunesse doit beaucoup à Schumann et a prospéré en Russie au XIXème chez des compositeurs comme Moussorgski ou Tchaïkovski, les deux présents musiciens s'inscrivent sans conteste dans ce qu'on a appelé l'idéal non formaliste du réalisme soviétique qui prône un art à la portée de tous. Sans pour autant qu'ils en perdent complètement leur âme et qu'au détour d'une phrase ou d'une tournure, la résistance soit absente. On sait ce que Chostakovitch savait en faire. Dimitri Kabalevski (1904-1987) écrit en 1937-1938 ses Trente pièces pour enfant op.27, juste après le fameux article de la Pravda fustigeant le ''modernisme'' de l'opéra Lady Macbeth de Mzensk de Chostakovitch précisément. Il faut de l’intelligibilité en musique, de la simplicité avant toute chose ! Les titres des morceaux sont bien sûr liés au monde de l'enfance, et si virtuosité il y a, elle ne doit pas détourner l'auditeur de la clarté du propos, comme il en va des dissonances, souvent bien réelles. Tout est entre les lignes ! Sans prétention, ces trente vignettes souvent très brèves sont pleines de clins d’œil, façon ''petit soldat de bois'', revisitées à la sauce musicale soviético-conforme. Elles sont soit vives (''En s'amusant'', ''Toccatina'', ou ''Chant de la cavalerie''), soit lentes (''Petite histoire triste'', ''Berceuse'' un peu appuyée, ''Petit conte de fée'', un brin nostalgique). On y expérimente des morceaux virtuoses (une ''Petite plaisanterie'' bien arpégée, une ''Étude'' bien difficile pour les doigts de jeunes pousses, une autre ''Étude'' non moins aisée dans son rythme changeant, comme il en va de ''Tempête de neige''). Il y en a aussi d'audacieuses : le bref ''Un conte'' ou ''Novelette'', terme schumannien s'il en est, bien moderniste cette fois. La dernière, '' Un événement dramatique'' - la plus développée du haut de ses deux minutes et demi - se vit comme une saynète réellement dramatique dans la répétition de 4 notes déclinées à l'envi. Quelques années plus tard, en 1952, Kabalevski écrit Cinq variations faciles op.51 qui prouvent qu'il n'a pas abandonné sa manière de vraie-fausse facilité et un certain soulignement du propos ''pour les enfants''.

Aram Khatchaturian (1903-1978) a également confié au piano et à ce même thème son Album pour la jeunesse, composé de deux volets. Le premier, Tableaux de l'enfance, de 1947, offre dix pièces plus conséquentes que celles de Kabalevski et d'une écriture plus raffinée. Ainsi de la poésie de ''Andantino'' ou de ''Légende-Tableau musical'' qui développe une vraie petite histoire, ou de la douleur de ''Liado est sérieusement malade'', ou encore de l'enjoué de ''Anniversaire'', valsant et tout empli de fièvre. D'autres morceaux peuvent être joliment virtuoses, comme ''Étude'' qui court sur le clavier, ou ''Cavalerie'' autrement plus vive plus que celle de son confrère. Dans ''A la manière d'un chant populaire'', on note une influence ibérique, et ''Invention'', tiré de l'adagio du ballet Gayaneh, est une courte scena inventée pour le jeune public. Le second volet, Dix pièces pour jeune pianiste (1965) s'inscrit dans le courant de la déstalinisation et est d'une écriture encore plus ouvragée qui ne renie pas les influences de Bartók et autres contemporains. La thématique est le jeu d'enfant (''Saut à la corde'', ''Barsik sur la balançoire'', c'est-à-dire le chat, ou encore l'alerte ''En jouant du tambourin''). On savoure le rythme de ''Danse orientale'' ou de ''Toccata'', diablement virtuose dans ses glissandos et son débit prestissime. ''Deux vieilles commères se disputent'' s'inscrit dans le filon des Tableaux d'une exposition de Moussorgski et son ''Marché de Limoges'' et cela caquette fort. ''Marche funèbre'' l'est bien peu, une manière d'hommage plutôt à quelque personnage fantasque, par son ostinato presque flamboyant.

Pour son 5ème album sous label Ad Vitam records, Tristan Pfaff offre un jeu architecturé mais aussi délié et nuancé. Il est enregistré à la ferme de Villefavard dans une acoustique un peu sèche. L'instrument, bien centré, est capté dans toutes ses harmonies.

Texte de Jean-Pierre Robert 

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