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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Alexander Melnikov joue les sonates de piano de Prokofiev

Alexander Melnikov Prokofiev

  • Serge Prokofiev : Sonates pour piano N°4 op.29, N°7 op.83, N°9 op.103
  • Alexander Melnikov, piano
  • 1 CD Harmonia Mundi : HMM 902203 (Distribution : PIAS)
  • Durée du CD : 58 min 20 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orange (5/5) 

Pour ce deuxième volume consacré aux sonates pour piano de Prokofiev, Alexander Melnikov a choisi de rapprocher trois œuvres appartenant à des époques créatrices différentes : de l'élan fougueux de jeunesse de la 4ème à la simplicité souverainement maîtrisée de la 9ème, en passant par la magistrale et tumultueuse 7ème. Dans des interprétations d'un étourdissant brio. 

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Serge Prokofiev compose sa Sonate N°4 en ut mineur op.29 en 1917, dernière œuvre de la période dite russe avant son émigration aux USA. C'est une des plus surprenantes de toutes, et pas seulement par sa brièveté. Comme la Troisième Sonate contemporaine, elle est écrite, selon le musicien, « d'après des vieux cahiers », en l'occurrence un projet de symphonie remontant à 1908. Le premier mouvement Allegro molto sostenuto présente un caractère narratif et mystérieux, ce qui n'empêche pas une fin avec des accords martelés. L'Andante assai est d'une extrême concentration d'abord dans une première partie austère et grave, puis avec un second épisode plus lyrique, presque pastoral, et une conclusion qui réunit les deux modes. L'Allegro final ''con brio ma non leggiere'' est une page à la fois sarcastique et d'une fantaisie presque schumannienne dans ses cascades de traits d'une belle légèreté et ses autres enchevêtrements originaux. Ce qui n'a pas de secret pour Alexander Melnikov qui offre un jeu architecturé sans sécheresse aucune.

La Sonate N°7 en si bémol majeur op.83 est la pièce centrale de la trilogie dite des ''sonates de guerre''. Écrite entre 1939 et 1942, elle sera créée par Sviatoslav Richter. Et fera l'admiration de Francis Poulenc. Prokofiev est ici à son summum de maîtrise et la pièce offre un chalenge technique incroyable à son interprète. Le langage âpre de l'Allegro ''inquietato'' s'appuie sur des lignes brisées, de violents rythmes de marche, des dissonances assumées et une progression confinant à la frénésie. Une soudaine éclaircie n'interrompt que passagèrement le récit qui se poursuit plus haletant, voire plus rageur encore, nanti de fortissimos brutaux. L'Andante ''caloroso'' aborde une phase de lyrisme dans le medium du clavier, mais le dire se fait peu à peu plus prégnant, parsemé de gammes ascendantes, d'accords fff plaqués ou encore d'imitations de sonneries de cloches au médian du mouvement. Le finale, marqué ''Precipitato'', pousse la dynamique à l'envi, de son martèlement ininterrompu, sorte de course infernale qui porte en elle quelque dérèglement dans son ostinato inéluctable et motorique jusqu'au plus fabuleux des crescendos. Melnikov que n'effraie pas ce tour de force pianistique, s'en empare dans une vision d'une extrême clarté et presque distanciée qui se dégage d'un premier degré trop uniformément percussif.

Avec la Sonate N°9 en ut majeur op.103, la dernière confiée à l'instrument (1947), n'était une autre inachevée, le langage est moins démonstratif, plus simple, en apparence du moins. Dédiée à Richter, elle est en quatre mouvements. Elle débute dans le calme d'un Allegretto dont les thèmes se suivent sans heurt, très intériorisés, traversés d'instants tendus jusqu'à une fin plus vive. L'Allegro ''strepitoso'', est un scherzo rythmé en arpèges capricieux laissant percer quelque sarcasme. L'Andante ''tranquillo'' figure un nocturne évoluant dans le registre grave et un esprit presque beethovénien. Une section plus rapide fait contraste, plus claire aussi. Le finale Allegro ''con brio ma non troppo presto'' est d'une fraîcheur jaillissante, presque ironique dans son cheminement joyeux et libéré qui cède un moment la place à un épisode plus apaisé, avant que le jeu reprenne et ses oppositions des registres extrêmes du clavier, comme souvent chez Prokofiev. Cette dernière partie se conclut sur un pianissimo. Melnikov joue cette œuvre avec toute la sagacité d'un amoureux de cette musique, associant virtuosité assagie et art du mélodiste.

La prise de son au Teldex Studio de Berlin est d'une présence tangible, restituant toute la richesse de kaléidoscope de la musique de piano de Prokofiev.

Texte de Jean-Pierre Robert    

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