Skip to main content
PUBLICITÉ
  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Songs de John Dowland ou la musique qui vient du cœur

Dowland Flores Smith

  • « Whose heavenly touch »
  • John Dowland : Choix de songs pour voix et luth
  • Mariana Flores (soprano), Hopkinson Smith (luth)
  • 1 CD Naïve : E 8941 (Distribution : Believe Group)
  • Durée du CD : 56 min 44 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orange (5/5)

Voici un passionnant florilège de songs de John Dowland, interprété par deux artistes ''dont le divin toucher'' rejoint celui du chantre de la musique élisabéthaine qui « sur le luth sait ravir les sens », comme le décrit le poète Richard Barnfield. Les prestiges d'un jardin secret.

LA SUITE APRÈS LA PUB

John Dowland (1563-1626) a écrit cinq Books of songs entre 1597 et 1612. Le programme du disque offre une sélection de pièces empruntées à chacun d'eux. Où le compositeur saisit le côté obscur de l'âme à travers « le génie d'une infinité de subtilités expressives qui se jouent entre mélodie et texte », selon Hopkinson Smith. C'est que les textes complexes confinent souvent à l'énigmatique. En tout cas, l'union de la voix et du luth est particulièrement accomplie dans des chants à la tonalité mélancolique. Mais où la confidence ne rime jamais avec monotonie. Un jeu d'ombre et de lumière plutôt. Ces songs sont de forme strophique et certains comportent un refrain.

Le sentiment le plus souvent illustré est celui de la plainte. Comme dans ''Flow my tears'' (Coulez mes larmes), ou ''I saw my lady weep'' (J'ai vu pleurer ma Dame) où Dowland exhale un inexorable tourment. Dans ''Sorrow, sorrow stay'' (Chagrin, demeure ici), le lamento traduit une grande tension émotionnelle. La tristesse, on la trouve aussi dans des pièces de ton plus élégiaque, comme il en est de ''O sweet woods'' (Ô bois charmants), là où le narrateur se confie « aux oiseaux, aux arbres, à la terre ». Cela peut aller jusqu'à l'hypnotique comme dans ''Come, heavy sleep'' (Viens, lourd sommeil). Le ton peut encore se faire plus fantasque et décidé : le song ''Fine knacks for ladies'' (Jolis colifichets pour dames) surfe sur la vanité des choses, car ''l'argent ne peut tout'' et ''les cadeaux de prix sont des leurres''. On trouve également deux pièces instrumentales : l'une tirée du dernier livre de chants de Dowland, A Pilgrim's Solace, l'autre qui est la version pour luth seul de ''Go crystal tears'' (Allez, larmes de cristal).

« Notre idéal est que la voix soit entre les cordes du luth, et que le luth embrasse la voix », déclarent les deux protagonistes. De fait, l'alliance voix-luth semble tomber sous le sens tant leur complicité est totale, fruit d'un long travail de maturation. Dans un répertoire qui a priori ne lui est pas familier, la soprano argentine Mariana Flores, dont on a déjà pu apprécier le talent sous les baguettes de García Alarcón (Il diluvio universale de Falvetti) ou de Gardiner dans Monteverdi, fait sienne cette poétique délicatement allusive. La beauté du timbre moiré est un atout non négligeable, qui s'enrichit d'un travail soigné sur les accents, singulièrement pour ce qui est du registre piano, dans les fins de phrases notamment si expressives de la voix qui s'éteint. La chanteuse traduit un kaléidoscope d'émotions subtiles par une savante palette de couleurs, des différences infinitésimales d'intensité et de belles tenues de voix. Tout aussi admirable est le naturel de la déclamation qui ne sollicite jamais le texte. Lui répondent les accents de velours du luth de Hopkinson Smith. Ce maître de l'instrument qui sait se faire discret, montre un jeu on ne peut plus habité. Qui traduit l'essence de la musique raffinée de Dowland, étroite fusion entre paroles et musique, au point que certains mots ont été choisis pour leur sonorité et l'écho qu'ils créent avec celle du luth. La légèreté et l'éloquence de l'instrument à cordes pincées sont ici comme d'évidence.

L'enregistrement, à la MC2 de Grenoble (en 2015), est à la fois proche et aéré, offrant une image sonore d'un beau relief.

Texte de Jean-Pierre Robert

LA SUITE APRÈS LA PUB

CD et MP3 disponibles sur Amazon

 



Autres articles sur ON-mag ou le Web pouvant vous intéresser


PUBLICITÉ