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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Les trios pour piano de Rachmaninov

Rachmaninov Trio Wanderer

  • Sergei Rachmaninov : Trio pour piano, violon et violoncelle N° 1"Élégiaque". Trio N° 2 "Élégiaque" op. 9
  • Edward Grieg : Andante con moto
  • Josef Suk : Élégie op. 23 (version pour trio avec piano)
  • Trio Wanderer
  • 1 CD Harmonia Mundi : HMM 902338 (Distribution : PIAS)
  • Durée du CD : 72 min 04 s
  • Note technique : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleue (5/5)

Dans le domaine plus que restreint de la musique de chambre de Rachmaninov, les trios avec piano occupent une place essentielle. Ils sont interprétés ici avec le tact et l'immense musicalité caractérisant une formation qui poursuit inlassablement son exploration du répertoire : le Trio Wanderer.

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Le Trio N° 1 avec piano, violon et violoncelle que Rachmaninov achève en 1892, est une œuvre de jeunesse, où apparaît déjà la patte de son auteur, singulièrement dans la virtuosité de la partie de piano. Il ne comprend qu'un seul mouvement, marqué "lento lugubre". En effet, le premier thème exposé par le piano est sombre et ce n'est qu'avec le second mélodique, con anima, que l'écriture se fait plus déliée. La primauté est accordée au piano comme au développement où alternent plages d'énergie et de sérénité. La coda revient au ton sombre du début, pour s'enfoncer peu à peu dans le silence. Rachmaninov commence à écrire le Trio N° 2 op. 9, "Élégiaque", le jour même de l'annonce de la mort de Tchaikovski, le maître vénéré, et l'achève quelques temps plus tard, fin 1893. Il le révisera en 1917. L'œuvre porte en sous-titre l'indication "À la mémoire d'un grand homme", hommage ému à l'auteur de la Symphonie Pathétique, et à son trio composé dix ans plus tôt, "À la mémoire d'un grand artiste". Trois mouvements composent cette vaste partition de près de 45 minutes. Le premier, Moderato, est ouvert par un sombre ostinato du piano exhalant comme une plainte. Puis un passage staccato mène au thème véritablement mélodique porté d'abord par le violoncelle. Il sera traversé d'éclairs tragiques, déclamatoires, poussant les deux cordes dans le registre le plus aigu. Le mouvement atteint le lyrisme caractéristique, élégiaque, soutenu par le ton pianistique virtuose si inhérent à l'auteur. La réapparition du premier thème enfonce le discours dans une douce rêverie. Le "Quasi variazione-Andante" expose le thème au piano, qui s'inspire de celui du second mouvement du trio de Tchaikovski. Il est décliné en huit variations extrêmement imaginatives. Ainsi de la deuxième confiée au seul piano, sorte d'intermezzo, comme improvisée, ou de la 3ème, sautillante sur des pizzicatos des cordes et des gammes du piano, de la 5ème dans le registre ppp, aux cordes irisées sur une écriture pianistique translucide, de la 7ème tragique, presque funèbre. La dernière conclut dans une atmosphère recueillie. Le finale, Allegro risoluto, résume plus encore l'hommage à Tchaikovski. Après une succession d'accords puissants du piano, s'installent des figures empruntant au modèle tchaikovskien avec ses phrases exacerbées, ses crescendos intenses au tragique assumé, en particulier au piano dans le registre fff. 

On a ajouté deux pièces singulières. L'Élégie op. 23 de Josef Suk, créée en 1902 dans sa forme pour trio avec piano, est aussi une sorte d'hommage, à un écrivain tchèque disparu : une longue phrase du violon sur des accords du piano reprise par le cello, module affectueusement, et pathétique. L'Andante de Grieg, avatar d'un projet de trio, de 1878, offre un discours nostalgique dans lequel le piano occupe une place essentielle. On remarque un beau lyrisme dans le traitement des deux cordes. Un épisode central plus clair fait contraste mais la coda est tragique, évoluant uniquement dans le registre grave.

Avec la fine musicalité qui les caractérise, les Wanderer offrent de ces pièces des exécutions somptueuses. Sans diminuer les talents de Jean-Marc Varjabédian, violon, et de Raphaël Pidoux, violoncelle, on ne peut que saluer la performance de Vincent Coq qui dans la partie de piano, si sollicitée dans les pièces de Rachmaninov, rivalise de ductilité et d'empathie.

Ils sont de surcroît magistralement enregistrés, la prise de son au Teldex Studio Berlin ménageant un équilibre exemplaire entre les trois voix. 

Texte de Jean-Pierre Robert

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