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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

Concert : Une heure espagnole en compagnie d'Anne Queffélec et de Gaspard Dehaene

Anne Queffelec Gaspard Dehaene

  • "Hommage à Ricardo Viñes"
  • Maurice Ravel : Menuet Antique. Miroirs
  • Claude Debussy : ''La Puerta del Vino", extrait des Préludes. "La soirée dans Grenade", extrait des Estampes. "Poissons d'or", extrait des Images
  • Manuel de Falla : Hommage à Debussy
  • Federico Mompou : "El Mariner et Ball del Ciri", extrait des Canciones y Danzas
  • Ricardo Viñes : Menuet spectral. Thrénodie ou Funérailles antiques
  • Erik Satie : "Airs à faire fuir", extrait des Pièces froides
  • Gabriel Fauré : "Le Pas espagnol", extrait de Dolly
  • Francis Poulenc : Sonate pour piano à quatre mains
  • Anne Queffélec, Gaspard Dehaene, piano à deux & quatre mains
  • Grand Salon de l'Hôtel National des Invalides, lundi 3 juin 2019 à 20 h

Dans le cadre du cycle musical "L'Heure espagnole", en écho à l'exposition "Picasso et la guerre", du Musée des Invalides, le présent concert signait un "Hommage à Ricardo Viñes". Ami des écrivains, des peintres, dont Pablo Picasso, et des musiciens, compagnon d'étude de Ravel, ce pianiste virtuose catalan (1875-1943) créa plusieurs pièces de celui-ci comme de Debussy ou de Poulenc. Anne Queffélec et son fils Gaspard Dehaene ont réuni un bouquet de pièces à deux ou quatre mains autour de ces compositeurs, symbole aussi de la consanguinité artistique entre France et Espagne. De généreux moments de musique partagée.

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Le concert alternait pièces françaises et espagnoles de ces musiciens joués naguère par le célèbre pianiste catalan, partagées entre les deux pianistes qui se rejoindront en dernière partie à quatre mains. Anne Queffélec, dont on sait la veine didactique intarissable pour présenter les morceaux joués, ouvre la soirée avec le Menuet Antique de Ravel, pièce vigoureuse qui ne se réfère à l'antiquité que dans sa partie centrale. Le jeu est contrasté dans ses effets de dynamique. Que l'on retrouve, plus tard, dans son interprétation inspirée des Miroirs. Créés en 1906 par Viñes, ces 5 pièces, comme "des miroirs traversés", selon elle, évoquent successivement des papillons de nuit aux couleurs inquiétantes ("Noctuelles"), un paysage lugubre avec des effets de cloches, comme dans Gaspard de la nuit ("Oiseaux tristes"), un autre plus solaire, foisonnant, tout en miroitements, jusqu'à une sorte "d'évaporation du son" ("Une barque sur l'océan"), une scénette presque tragique, d'une rigueur impitoyable avec figuration de claquements de talons d'un bouffon esseulé ("Alborada del gracioso"), enfin un morceau éclatant, où le temps est comme suspendu ("La vallée des cloches"). En contrepoint, Anne Queffélec offre une pièce de Federico Mompou, extrait de ses Canciones y Danzas, un musicien espagnol qui est entré en musique par Fauré.

C'est au tour de Gaspard Dehaene du mêler morceaux français et espagnols : deux pièces de Debussy d'abord, recourant au même rythme de habanera : ''La Puerta del Vino" et "La soirée dans Grenade", profusion de rythmes et de couleurs plus ibériques que nature. Il en restitue tout le climat poétique. Intéressant contraste avec de Falla et son Hommage à Debussy, où le piano sonne presque comme une guitare. Ou encore avec Viñes lui-même, compositeur à ses heures : son Menuet spectral, en hommage à Maurice Ravel, en dit long sur une amitié indéfectible, car il y a ici du "à la manière de Ravel", avec notamment des indications métronomiques que n'aurait pas reniées ce dernier, comme "tendre et maniéré". Thrénodie ou Funérailles antiques, à la mémoire d'Erik Satie, monodie triste mais combien habitée, est peut-être la réplique amicale aux ''Airs à faire fuir", extraits des Pièces froides de l'excentrique français, ce "clown triste qui a hissé l'absurdité au rang des Beaux-Arts". Car ils sont dédiés à Ricardo Viñes. Retour à Debussy avec "Poissons d'or", tirés des Images, morceau inspiré d'un paravent de laque chinoise, lesdits poissons évoluant joliment en figures diverses dont une valse effleurée. L'exécution de Dehaene est magistrale.

Les deux interprètes se rejoignent sur le même banc pour jouer à quatre mains. Ce sera d'abord la Sonate pour piano à quatre mains de Poulenc. Cette pièce de jeunesse (1918), témoigne là encore d'une relation artistique car le pianiste Viñes qui a formé le français, éprouvait une belle admiration pour ses premières compositions. D'une étonnante concision, puisque ne durant que quelques sept minutes, la sonate offre trois mouvements on ne peut plus contrastés : un "Prélude", nanti de martèlements impitoyables, dans l'orbite du Sacre de Stravisnky, et qui se souvient peut-être aussi des moments tragiques vécus par les soldats de 14, une "Rustique", marquée "naïf et lent", qui rappelle aussi des compositions plus calmes de Stravinsky, enfin un "Finale", tout aussi frénétiquement articulé que le premier mouvement, cavalcade truffée de dissonances, qui paie aussi sa dette envers Satie. Ils donnent ensuite "Le Pas espagnol" extrait de Dolly de Fauré, pièce très alerte, entraînante, qui fait penser à Chabrier, jouée de manière éblouissante. Poursuivant dans la même formation à 4 mains, ils offriront en bis la Pavane de Fauré, puis ''Le jardin féérique", morceau final de Ma mère l'Oye de Ravel, grandiose et d'un irrésistible allant. 

Texte de Jean-Pierre Robert

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