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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

Sharon Kam et Matan Porat aux Invalides - concert du 12 mars

Concert Sharon Kam Quintett 205

Olivier Messiaen : « Abîme des oiseaux » pour clarinette seule
Robert Schumann : Grande Humoresque op. 20 pour piano
Johannes Brahms : Sonate N°2 pour clarinette et piano op. 120 N°2
Jules Massenet : « Méditation de Thaïs », transcription pour clarinette et piano
Francis Poulenc : Sonate pour clarinette et piano
Sharon Kam, clarinette, Matan Porat, piano
Lundi 12 mars 2018, Hôtel national des Invalides

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http://www.musee-armee.fr/

Dans le cadre de l'ouverture récente, au Musée de l'Armée aux Invalides, du cabinet des instruments de musique militaire, dédié pour l'essentiel au facteur Adolphe Sax, le festival « Vents d'hiver » met à l'honneur la famille des vents. Ainsi en était-il de la clarinette, lors du concert donné par Sharon Kam dans le grand salon de l'Hôtel national des Invalides, accompagnée par le pianiste Matan Porat, réunissant des œuvres de Messiaen, Brahms, Massenet et Poulenc.

Le concert connaissait deux parties dissemblables, chacun des instrumentistes se produisant d'abord en solo, puis jouant ensuite ensemble. Extrait du Quatuor pour la fin du temps, qu'Olivier Messiaen écrit en captivité en 1940, le troisième mouvement « Abîme des oiseaux » est réservé à la seule clarinette. D'une extrême difficulté technique, le morceau évoque deux composantes essentielles de l'univers du musicien, le Temps et ses fluctuations, les oiseaux et leurs « jubilantes vocalises ». La fabuleuse maitrise de Sharon Kam porte ce morceau à l'incandescence : différences dynamiques extrêmes dont ce son venant du silence pour s'enfler démesurément, science des couleurs. Vient ensuite la Grande Humoresque pour piano op. 20 de Schumann. Œuvre redoutable s'il en est car la pensée du musicien se fait bien ésotérique, fuyante même, pour un esprit cartésien. Née de l'« Humor » allemande, elle se complait dans de formidables écarts de climats, succession de moments fantasques et de sursauts d'une rudesse inouïe. C'est que la structure en est peu discernable, enchainant des sections on ne peut plus disparates. Matan Porat n'évacue pas cette diversité par un jeu souvent d'une extrême violence.

La réunion des deux artistes procure des instants plus amènes. La Deuxième Sonate pour clarinette et piano op 120 N° 2 que Brahms écrit en 1894 dans la station autrichienne de Bad Ischl, à l'intention du clarinettiste fameux Richard von Mühlfeld - sa dernière pièce de musique de chambre - est un chef d'œuvre d'intériorité par son caractère méditatif et son aura poétique qui ne flatte nullement la virtuosité. Comment résister au merveilleux thème enveloppant ouvrant l'allegro amabile, ou à l'appassionato suivant en forme de scherzo joliment impétueux, que différencie un trio sostenuto, ou encore au finale qui à partir d'un beau et simple thème mélodieux, décline cinq variations richement travaillées. Les deux interprètes sont à l'unisson d'une œuvre merveilleusement évocatrice de l'art tardif de Brahms. La complicité est encore plus palpable dans la Sonate pour clarinette et piano de Poulenc. Écrite pour Benny Goodman, qui la créera à New York, trois mois après la mort du musicien, avec Leonard Bernstein au piano, elle fait partie d'un duo de sonates, l'autre pour hautbois, « mijotées dans la même casserole », selon l'auteur. Elles témoignent de l'art avec lequel Poulenc écrit pour les vents, comme il l'avait déjà pratiqué pour la flûte. La présente sonate contraste un « allegro tristamente » qui selon le schéma ABA, fait se succéder un tempo allant et une section « très calme », mélancolique, puis une « Romenza » - issue d'un Lamento écrit en 1959 dédié à Arthur Honegger - d'un mélodisme envoûtant avec une pointe de dolorisme, enfin un « allegro con fuoco », plein d'esprit, de fantaisie gouailleuse et hyper virtuose dans le registre aigu de la clarinette. Sharon Kam y fait montre d'une étourdissante maîtrise et Matan Porat lui emboîte le pas allègrement. 

Entre les deux sonates, l'inusable Méditation de Thaïs aura fait fonction de transition. La transcription pour clarinette – un des nombreux arrangements de ce court morceau du II ème acte de l'opéra de Massenet, conçu pour violon solo – lui offre un caractère plus envoûtant que religieux, et les passages tendus dans le registre aigu possèdent ici une agressivité presque inconfortable, même si l'exécution de Sharon Kam est irréprochable. Autres pièces isolées, ils donneront en bis un morceau brillant de Kreisler prolongeant l'humour du finale de la sonate de Poulenc, de son amusant trottinement et son clin d'œil jazzy, puis la mélodie de Fauré « Après un rêve », où la clarinette tient le rôle du baryton.

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Jean-Pierre Robert



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