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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Sonates et Trio de Debussy

Debussy sontes trio

Sonate pour violoncelle et piano. Sonate pour violon et piano. Sonate pour flûte, alto et harpe. Syrinx. Trio pour violon, violoncelle et piano.
Renaud Capuçon, violon, Gérard Caussé, alto, Edgard Moreau, violoncelle, Bertrand Chamayou, piano, Emmanuel Pahud, flûte, Marie-Pierre Langlamet, harpe.
1CD Erato : 0190295773960 (Distribution : Warner Music)
Durée du CD : 65'38.
Note technique : 5/5

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La quintessence de l'art debussyste par la fine fleur des musiciens français actuels, voilà une réalisation à marquer d'une pierre blanche ! Inutile d'ouvrir encore le sempiternel débat impressionnisme versus symbolisme : « Je n'ai rien inventé. J'ai tout au plus présenté des choses anciennes d'une manière nouvelle » tranchait déjà Debussy. Ses trois sonates – sur un projet d'en écrire six, pour divers instruments - renouvellent le genre : la discontinuité des mouvements introduit un esprit d'impromptu et achève de faire de ces pièces des incontournables du répertoire chambriste français.

La Sonate pour violoncelle et piano trouve ici une interprétation généreuse due à la sonorité ample d'Edgard Moreau. Son étrangeté apparait dès le prologue et ce « mouvement immobile » si bien décrit par Jankélévitch (« Debussy et le mystère de l'instant », Plon). Le rythme déhanché de « Sérénade » et la folle course-poursuite du « Finale », noté « animé », découvrent des arrières plan d'une insondable gravité. Le beau piano de Chamayou sait justement laisser au cello la primauté qui lui revient. La Sonate pour flûte, alto et harpe, une combinaison atypique pour une conversation « affreusement mélancolique », aux dires de son auteur, magnifie ce que Jankélévitch appelle « la phrase dépressive... tentée par le mystère de la perdition ». Au fil de ses trois séquences, dont l'« Interlude » médian, la flûte éthérée de Pahud, en dialogue avec l'alto charnu de Caussé, sous la houlette de la harpe translucide de Langlamet, tressent une délicate cantilène en menuet. Les contours, ici peu marqués, instillent cette dose de mystère qui sied si bien à la main debussyste. Le finale se veut dramatique par les interventions soulignées de l'altiste, et ses relents tziganes ne sont qu'un exemple de l'extrême inventivité thématique et rythmique de ce morceau. La Sonate pour violon et piano illustre le refus du développement chez l'auteur de Pelléas, le « surgissement de l'instant » (ibid.). la vision de Renaud Capuçon et de
Chamayou, d'une sobre grandeur, insiste sur le mystère, comme à l'allegro vivo initial, idéalement contrasté, dans ses phrases haletantes ou assagies, ou à l'heure de l'« Intermède », marqué « fantasque et léger », là où l'entente entre les deux produit quelque souverain achèvement. Le finale « très animé » génère le « joyeux tumulte » recherché, tout empli d'une « simple idée tournant sur elle-même », et s'achevant sur un formidable crescendo cédant le pas au mystère angoissé du début.

Syrinx (1913) demeure un petit joyau, surtout sous les doigts d'Emmanuel Pahud : douceur, abandon, suprêmes couleurs jusqu'aux ultimes notes qui meurent dans le silence. Le trait véloce le cède à la plus fine poésie. Enfin, en remontant la chronologie, à 1886, le Trio pour violon, violoncelle et piano déploie son discret charme mélodique, comme à l'andantino qui convoque Franck, voire même Massenet, dans le dialogue d'effusion entre violon et cello, et son bel effet modulant. La rythmique curieuse du scherzo est servie ici par les plus souples sonorités galliques. L'andante espressivo amené par le violoncelle, que rejoint le violon à l'unisson, apporte quelque contemplation voluptueuse que les présents interprètes savent ne pas rendre ''facile''. Quant au finale appassionato, ils lui communiquent une verve aussi irrésistible que contrôlée.

Pour les Sonates pour violoncelle et pour violon, comme pour le Trio, on a privilégié une prise de son extrêmement présente, mais ménageant un bel équilibre entre les voix. Pour Syrinx et la Sonate pour flûte, l'atmosphère est plus ouverte, ce qui laisse à cet instrument tout loisir de respirer. 

Texte de Jean-Pierre Robert    

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