CDs : Guy Bovet - Historical Organs of the Philippines

Vol. 1.
Orgues de Bohol : Loay, Loboc, Baclayon
Durée : 1h 10’ 45’’
CD Gallo 1361 (www.vdegallo.ch)
Notre avis : (4/5)

Ce coffret de quatre CDs bien remplis nous présente les orgues historiques des Philippines. Une série de CDs qui ne pourront que réjouir, et ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, les fans d’orgue. Avec ceux-ci, dont la plupart d’entre nous n’ont jamais entendu parler, les voici en plein exotisme, car ils s’agit d’orgues baroques espagnols, parfois en bambou, souvent avec des sonorités très différentes de nos orgues européennes. Et avec des répertoires, eux aussi, locaux pour la plupart.

Le premier CD nous donne à entendre d’abord l’orgue en bambou de l’église de la Sainte-Trinité de Loay, sur l’île de Bohol. Construit en 1841, largement dégradé (le climat tropical humide et les événements sont loin d’être des gardiens efficaces) il est aujourd’hui restauré depuis 1999. Guy Bovet y joue des pièces du Napolitain Antonio Valente (1520-1581), de Sebastian Aguilera de Heredia (1570- ?), du Mexicain Joseph de Torres y Vergara (1661-1727) et d’anonymes, destinées à nous faire entendre les possibilités de cet orgue étonnant, y compris celle se son tuyau d’anché séparé (pittoresque, dit Guy Bovet, très magnanime) destiné à imiter la cornemuse dans « Gaita ».
Toujours dans la même île, c’est ensuite l’orgue de l’église St Pierre à Loboc, à la sonorité plus familière à nos oreilles, construit au début du 19^ème siècle et restauré depuis 2003. Guy Bovet y joue un concerto du Basque Fernando Eguiguren (1743- ?) et des airs de Pablo Bruna, de Sebastian Duron, de Francisco Correa de Arauxo ou de Francisco Perez Gaya, compositeurs de musique baroque inconnus chez nous.
Enfin, voici l’orgue à double clavier de l’église de l’Immaculée Conception à Baclayon, construit en 1824 et restauré en 2008. Guy Bovet y joue une symphonie baroque tardive du Catalan Carles Baguér, une pièce de José Elias et une œuvre anonyme, pour faire sonner les timbales.
Au total, un CD qu’apprécieront tous les curieux et les mélomanes, autant pour son exotisme que pour sa musicalité.

Vol. 2.
Orgue de Bacong
Durée : 58’ 59’’
CD Gallo 1362 (www.vdegallo.ch)
Notre avis : (4/5)

Le deuxième volume de cette série est consacré entièrement à l’orgue de l’église Saint Augustin de Hippo à Bacong, dans l’île de Negros. Cet orgue a été construit à Saragosse, en Espagne et importé aux Philippines en 1894, puis, extrêmement endommagé par une invasion de termites, a été restauré en 2009, par la firme Diego Cera Organ Builders, qui est un des nombreux sponsors de ce coffret. C’est un orgue romantique espagnol sans pédalier et, pour cet orgue assez modeste, (56 notes et un dessus de cornet de trois rangs), Guy Bovet a choisi un répertoire tiré d’un recueil d’Hilarion Eslava (1807-1878), trouvé dans un orgue en Catalogne. Des pièces de cet Hilarion Eslava, mais également une belle Elevacion de Damian Sanz et une autre de Felipe Gorriti (1839-1896), un Ofertorio de Pedro Albeniz (1793-1855), une Chanson triste d’Eduardo Torres et deux pièces sur des thèmes populaires basques. Il a en outre ajouté deux compositions personnelles (une improvisation sur l’hymne national philippin et une de ses compositions en forme de fandango), pour faire entendre d’autres registres comme celui de la gaita ou des pajaros.

Vol. 3.
Orgue de Saint Augustin d’Intramuros
Durée : 53’ 19’’
CD Gallo 1363 (www.vdegallo.ch)
Notre avis : (4/5)

A Intramuros, le plus ancien quartier de Manille, l’orgue de l’église Saint-Augustin a une histoire un peu compliquée. Les deux orgues de chambre qui existaient dès 1584 furent détruits complètement lors de l’invasion britannique de 1762. On en construisit un autre qui ne dura pas et on en fit faire un autre en 1814, à deux claviers en utilisant l’ancien instrument du XVIIIème siècle comme clavier d’écho. C’est probablement le père Diego Cera qui l’a terminé, celui-là même en l’honneur de qui les restaurateurs philippins actuels font référence pour nommer leur entreprise. Bombardements en 1945, tout le quartier d’Intramuros est détruit, sauf l’orgue et le couvent. En 1976, ses malheurs ne sont pas finis, on l’électrifie. Enfin, on le restaure dans son état d’origine en 1998.
L’organiste Guy Bovet y joue deux pièces, un Salve Regina et un pot-pourri (une ensalada, en espagnol) très brillants. Il joue aussi une variation d’Antonio de Cabezon (1510-1566) et un très beau Tiento de Francisco Correa de Arauxo, ainsi que différentes pièces d’anonymes (passacaille, batalla) pour mettre en valeur l’instrument. Ainsi que quatre petites sonates de Domenico Scarlatti. Une belle occasion pour découvrir une tradition baroque espagnole du bout du monde.

Vol. 4.
Orgue de bambou de Las Piñas
Durée : 59’ 38’’
CD Gallo 1364 (www.vdegallo.ch)
Notre avis : (4,5/5)

At last, but not least, voici le célébrissime orgue de bambou, classé trésor national en 2004, de l’église St Joseph de Las Piñas, qui était autrefois à quinze kilomètres de Manille, mais qui fait aujourd’hui partie de l’agglomération-capitale. Les conditions d’enregistrement furent dantesques (obligation d’enregistrer la nuit, bruits de circulation intempestifs, travail sur plages de quelques secondes et de montage ensuite, attentes interminables entre les flots de circulation). Guy Bovet commence l’enregistrement par une variation de son cru sur un cantique local. Puis, viennent des réductions indiennes d’airs du Paraguay, au XVIIIème siècle, héritage des missions jésuites, Un tiento et une toccata de Juan Cabanilles (1644-1712), un fandango de José Blasco de Nebra (1702-1768) et un tiento de Pablo Bruna (1611-1679). On quitte la musique baroque pour huit airs écrits spécialement pour l’orgue de bambou, par le compositeur contemporain Wolfgang Oehms. Final enfin avec la sonate n°6 en quatre mouvements du père Antonio Soler. L’orgue de bambou a un son plus moelleux, plus suave que ses cousins métalliques.
Au total, ce coffret est une véritable découverte, à la fois d’orgues exotiques très intéressants, mais également de répertoires fort ignorés sous nos latitudes. Qui plus est, en achetant ces CDs, vous contribuez à la formation de jeunes organistes philippins et vous incitez ceux qui sont engagés dans cette réhabilitation des orgues historiques indonésiennes à continuer leur œuvre. Et il reste d’autres orgues à restaurer.

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