Actus Blu-Ray/DVD « La Jeune Fille au carton à chapeau » : un chef-d’œuvre du muet…

Note artistique : (5/5)

Synopsis

Natacha Korosteleva fabrique des chapeaux à domicile qu'elle livre ensuite à Madame Irène, modiste à Moscou. Au cours d'un de ses déplacements, elle fait la connaissance d'Ilia Snegirev, un jeune ouvrier d'origine provinciale. Afin de lui venir en aide, elle contracte avec lui un mariage fictif. Ilia pourra ainsi être logé dans une des chambres de Madame Irène. Un jour, celle-ci paie Natacha au moyen d'une obligation d'emprunt à lots. Au tirage au sort, l'obligation vaut 25 000 roubles. La propriétaire du magasin et son époux tentent alors d'influencer Natacha afin de récupérer la somme d'argent…

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Titre original : Девушка с коробкой (Devushka s korobkoy)
Support : DVD
Genre : comédie
Année : 1927
Réalisateur : Boris Barnet
Casting : Anna Sten, Vladimir Mikhaylov, Vladimir Fogel, Ivan Koval-Samborsky, Serafima Birman, Pavel Pol, Vladimir Popov
Durée : 1 h 05 mn 06
Format vidéo : 16/9
Format ciné : 1,33/1 noir et blanc muet
Sous-titrage : français
Pistes sonores : MPEG 2.0 stéréo musique de Stéphane Damiano
Bonus : version projetée en public en ciné-concert, live enregistré au théâtre de La Mure (Isère) le 20 septembre 2014 (65 mn 53)
Éditeur : Bach Films

Commentaire artistique

Cette comédie est à l’origine un film de commande étatique dont le sujet, confié à Boris Barnet, est la promotion des emprunts russes avec une loterie à la clé. Pour son premier film, le jeune réalisateur de 25 ans, qui deviendra plus tard un des plus grands cinéastes soviétiques, applique son futur crédo, « montrer l’époque contemporaine, l’homme vrai des temps soviétiques… ». Le prétexte du billet de loterie servira à vilipender la petite bourgeoisie urbaine installée dans son confort et mue par l’appât du gain tout en et glorifiant l’humilité et la candeur d’un prolétariat méritant, originaire de la campagne. Le tableau, qui insiste sur le fossé séparant les classes sociales, se double d’un constat sur l’écart existant entre citadins et campagnards. Cette comédie affiche clairement les ambitions politiques soviétiques du moment, l’éloge du socialisme et de la nouvelle politique économique. Le génie de Boris Barnet est d’avoir su écarter toute tentation propagandiste, et les clichés et l’affectation qui vont avec, au profit d’une histoire légère et savoureuse d’une grande modernité. Loin du burlesque traditionnel et de la « tarte à la crème », le cinéaste construit son film sur un humour plutôt subtil sans pourtant se priver de séquences cocasses (gag répétitif, bagarre ostentatoire…). La romance poétique est incarnée par Anna Sten, une actrice exceptionnelle de spontanéité et craquante à souhait, qui vampirise l’écran : chacune de ses apparitions fascine et monopolise définitivement l’attention. Dommage que cet immense talent ait été complètement gâché lorsque l’actrice émigra aux USA en 1933 ! La vision de cette comédie, paraissant très éloignée du cinéma soviétique de l’époque, surprend ; pourtant Boris Barnet a appliqué, avec brio, les principes préconisés par Lev Koulechov, théoricien du cinéma : il soigne son tournage, éclairages et gros plans, qu’il sublime par un montage rigoureux. Le jeu de ses comédiens doit son caractère expressif mais peu naturel aux influences du théâtre satirique du temps et du groupe avant-gardiste FEKS. Cet authentique chef-d’œuvre, rythmé d’éblouissantes trouvailles visuelles, est à ne manquer sous aucun prétexte ! Le DVD nous propose, en supplément, une très sympathique version ciné-concert, enregistrée en 2014 avec Jean-Philippe Seunevel en bonimenteur et Stéphane Damiano au piano.

Commentaire technique

Copie SD en version remastérisée, assez bien définie, cadre instable, contraste variable avec des fluctuations, contours accentués, bonne échelle de gris, noirs francs, défauts (rayures, piqures blanchâtres…), couleurs chaudes (version ciné-concert) ; mixage stéréo clair, dynamique, stéréophonie frontale ample.